EMISSION DU 19/09 - par bourse news Vers un baril à 100$: Le spectre du pétrole cher plane à nouveau sur le Maroc

Le pétrole évolue à son plus haut niveau de l'année, suscitant des inquiétudes sur le déficit d'offre, car l'Arabie Saoudite et la Russie, deux des plus grands producteurs de l'OPEP+, ont annoncé qu'elles maintiendraient leurs réductions de production jusqu'à la fin de l'année 2023. L'Arabie Saoudite, dans le but de financer d'ambitieux investissements, a choisi de maintenir la baisse de sa production jusqu'à la fin de l'année, une décision qui a également été prise par la Russie.

Les contrats à terme sur le Brent ont dépassé les 95 dollars mardi et le prix de référence utilisé pour négocier la plupart des cargaisons physiques dans le monde, le Brent BFO, se maintient au-dessus de 96 dollars. Selon plusieurs experts, il est très probable que le Brent dépasse les 100 dollars, car «il suffit d'un peu d'agitation pour qu'il dépasse ce seuil».

La banque suisse UBS estime, pour sa part, que le baril de Brent devrait se négocier dans une fourchette de 90 à 100 dollars au cours des prochains mois, avec un objectif de 95 dollars en fin d'année. Les marchés d'options évaluent désormais à 45% la probabilité que le Brent reste au-dessus de 90 dollars le baril d'ici à janvier 2024, avec le risque que le pétrole soit réévalué à la hausse.

Le Directeur général de Chevron, Mike Wirth, a estimé également sur Bloomberg TV, que le prix du baril pourrait franchir les 100 dollars. «Cela bougera certainement dans cette direction, l'offre se tend, les stocks s'assèchent», a-t-il expliqué.

De son côté, Tahar Zerrari, Directeur général adjoint de Sogécapital Gestion, nous explique qu’«après avoir emprunté un sentier baissier et s’être stabilisé aux alentours de 80 dollars le baril, la réduction significative de l’offre de la Russie et de l’Arabie Saoudite fait que les prix du pétrole repartent à la hausse, bien entendu ceci est entouré d’autres hypothèses».

Impacts multiples pour le Maroc

Avec une dépendance énergétique quasi-totale, le Maroc paie le prix cher à chaque flambée des cours des matières premières. Rappelons qu’en 2022, la facture énergétique du Maroc avait atteint un niveau record, sur fond principalement de la hausse des produits pétroliers. Elle a plus que doublé par rapport à 2021 pour atteindre 153,5 Mds de DH (+102%). Cette même année, la charge de compensation a coûté au gouvernement quelque 42 milliards de DH contre une projection initiale de 17 milliards de DH.

«Aujourd’hui, tous les indicateurs militent pour une convergence d’un baril à 100 dollars et cela aura des conséquences sur le gaz et ainsi sur un éventuel alourdissement de la charge de la Caisse de compensation. Mais encore une fois, il faut garder à l’esprit que c‘est un marché très volatil qui dépend d’éléments structurels et conjoncturels, lesquels doivent être suivis de près», suggère le DGA de Sogécapital Gestion.

Il faut dire que la hausse du pétrole met à rude épreuve les finances publiques du Royaume, tout en pesant sur le pouvoir d'achat des consommateurs. Cette hausse a un impact direct sur les prix à la pompe, avec des hausses successives opérées par les pétroliers depuis le début du mois d'août. À ce jour, le prix du litre de l’essence dépasse les 15 DH, celui du gasoil les 13 DH. Cette flambée des prix à la pompe a également des répercussions sur d'autres secteurs, comme le transport, contribuant ainsi à l'augmentation de l'inflation que le Maroc s'efforce de contenir. De plus, en tant que pays importateur net de pétrole, l’appréciation des prix des produits énergétiques à l’international rehausse également les paiements du Maroc en devises.

«En tout cas, le Budget sera bientôt fixé lors de Loi de Finances et c’est à ce moment-là que des tendances plus claires se dessineront notamment par rapport au marché obligataire et sa tendance en 2024», résume Zerrari.

Rappelons que si le gouvernement reste aujourd’hui flou sur le calendrier du démarrage de la réforme de la Caisse de compensation, la Banque centrale, elle, a d’ores et déjà intégré dans son scénario central «une décompensation programmée des prix des produits subventionnés à partir de 2024». Une réforme qui s’étalera sur 2 ans et qui devrait raviver les tensions inflationnistes en 2024 voire au-delà (+3,8% prévue par BAM).

Au final, maintenir une certaine stabilité budgétaire dans ce contexte de hausse continue des prix sans provoquer d’effet d’éviction sera un délicat exercice pour l’État. Lui qui, dans les priorités du PLF 2024, souhaite «renforcer l'équilibre financier et rétablir les marges budgétaires nécessaires à la poursuite des différents chantiers de développement».