Le secteur de la sidérurgie séduit difficilement les investisseurs, une tendance mondiale caractérisée par des primes de risque parmi les plus élevées. Il faut dire que la surcapacité mondiale en acier atteignait 551 millions de tonnes en 2023, soit quatre fois la production annuelle d'acier de nos voisins de l'Union européenne, ce qui exerce une pression permanente sur les prix. Cependant, au Maroc, des événements internes provoquent une reconfiguration qui mérite de s'y attarder.
L'un des épisodes marquants de cette recomposition est la situation délicate du groupe Univers Acier, considéré comme un acteur majeur du secteur. Fragilisé par l'entrée en vigueur de nouvelles normes d'importation et par une situation financière tendue, le groupe a vu ses capacités de production (estimées à 30 000 tonnes) chuter drastiquement (5000 à 10.000 tonnes par moment selon les experts), avec même des arrêts temporaires.
La cause ? Les nouvelles règles d'importation, entrées en vigueur en juin, exigent des importateurs de billettes qu'ils soient eux-mêmes producteurs et qu’ils respectent les normes marocaines pour disposer de licences. Ces mesures ont mis à rude épreuve les chaînes d'approvisionnement de la société, particulièrement depuis le début du troisième trimestre. Ces tensions se sont aggravées à l'automne, accentuant le déséquilibre sur le marché.
Pendant ce temps, les groupes mieux structurés comme Sonasid et Riva Industries ont consolidé leurs positions, bénéficiant, selon plusieurs experts du secteur, à la fois d'une demande accrue et d'une hausse des prix liée au déséquilibre de l'offre. "Le contexte est favorable aux leaders du secteur qui profitent de l'ajustement des capacités de production des sidérurgistes marocains, Univers Acier étant un grand producteur avec un impact réel sur les prix", explique un opérateur du secteur.
Une demande en forte reprise
Parallèlement, la demande d'acier connaît un net regain depuis septembre, porté par le lancement de grands projets structurants au Maroc, indique notre source. Les chiffres parlent d'eux-mêmes : Sonasid a enregistré une "forte croissance des volumes de vente" et "prévoit de tirer parti de la dynamique du marché de la construction pour le quatrième trimestre 2024 et au-delà", selon le communiqué financier de la société au troisième trimestre. Maghreb Steel, de son côté, a rapporté dans sa communication financière une hausse de 27 % des volumes vendus au troisième trimestre.
Ce rebond de la demande, combiné à une recomposition du marché autour des acteurs les plus robustes et à une hausse graduelle des prix, semble dessiner un nouvel équilibre pour la sidérurgie marocaine, permettant de redresser les marges à court terme des opérateurs historiques.