Vendredi 10 Novembre 2023

Bourse et épargne populaire : l’urgence d’un nouveau cadre fiscal

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  • Malgré le lancement du plan d’épargne en actions (PEA) en 2011 et la démocratisation de la Bourse en ligne, l’accès à la Bourse reste limité chez les Marocains quand d’autres pays comme la Tunisie et l’Égypte ont réussi ce pari, essentiellement grâce à un ajustement fiscal précis et connu de tous. Décryptage !
     

Le Salon de l’épargne était pour nous l’occasion de faire, une nouvelle fois, le constat amer du manque de popularité de la Bourse auprès du grand public. Un sentiment confirmé par les chiffres partagés par la présidente de l’AMMC, Nezha Hayat, qui donnait le coup d’envoi du Salon : Le Maroc compte 150.000 comptes titres de personnes physiques et 22.000 porteurs de parts d’OPCVM. Des chiffres très faibles quand on connait la taille du gisement potentiel avec plus de 16,5 millions de comptes bancaires dans le Royaume.


Les introductions en Bourse, généralement surmédiatisées, comptent moins de 6.000 souscripteurs en moyenne depuis 10 ans. Un chiffre à comparer avec les 130.000 investisseurs individuels qui ont pris part à l’introduction en Bourse de Maroc Telecom en 2004.


Malgré tous les efforts fournis par les autorités et les opérateurs, la Bourse reste un produit élitiste. Le plan d'épargne actions et malgré des ajustements apportés en cours de route, est un véritable échec. Pourtant, les actions sont l'instrument financier le plus simple, le plus accessible et le plus performant à long terme. La Bourse, c’est en effet plus de 600% de gains sur 30 ans, sans compter les dividendes !


Alors comment faire ? En discutant avec les opérateurs de marché durant le Salon, deux volets doivent être adressés par l’écosystème pour drainer cette épargne populaire. Le premier est d’ordre informationnel : Éduquer, expliquer, mieux informer….Répéter l’exercice constamment, dans les régions et à grande échelle.


Le second levier est d’ordre fiscal. Et de ce point de vue-là, les résultats sont plus rapides, durables et perceptibles. Le Plan d’épargne en actions (PEA) existant offre une exonération sur les gains à condition de garder les titres en portefeuille durant 5 ans. Mais l’ensemble des professionnels le disent, la Bourse est un produit risqué à court terme. C’est un refrain qui revient souvent. Pour contrer cet argument, il est temps de mettre en place un avantage fiscal à l’entrée comme pour l’assurance-vie qui connaît un grand succès (13 Mds de dirhams de primes rien que sur le premier semestre 2023). Les cotisations en assurance-vie sont déductibles de l’impôt sur le revenu à hauteur de 50% du salaire, ce qui crée un engouement des salariés à travers une épargne programmée. Or, et les chiffres le démontrent, une épargne programmée en actions est extrêmement profitable. Faire profiter l’investisseur en actions du même avantage fiscal que l'assurance-vie, réduit les risques à court terme et l’encourage à rester à long terme. 


L’investisseur pourra dès lors mettre 200, 300, 1000 DH par mois dans son PEA, déduire ce montant de son impôt et investir sereinement dans un marché boursier au service de la croissance et de l’économie.


Des pays comparables comme l’Égypte et la Tunisie ont réussi à enrôler les investisseurs particuliers grâce à ce mécanisme. Par exemple, la Tunisie a instauré une déductibilité des sommes déposées dans le PEA jusqu’à 50.000 dinars par an et une exonération de l'impôt sur les plus-values. Les dividendes sont taxés. La condition est que toute la somme versée dans le PEA doit être utilisée dans 30 jours de Bourse. Le marché tunisien est aujourd’hui extrêmement populaire avec plus de 60% des volumes générés par les particuliers contre moins de 11% au Maroc. Et surtout, et malgré une décennie noire sur le plan économique, ce marché arrive à capter de nouvelles IPO grâce au dynamisme des investisseurs privés.




Personnes physiques : acteur important pour le développement du marché

Un marché où les personnes physiques sont actives est un marché liquide et donc en bonne santé. 
Sur un autre volet, récemment, les IPO de petites entreprises ont mis à nu l’incapacité des investisseurs institutionnels et des OPCVM à accompagner les petites opérations avec de faibles tickets. Avoir des particuliers déjà présents permettrait au marché de mieux accueillir ces PME. 


Troisièmement, pour réussir sa stratégie, le fonds Mohammed VI, qui est en train de créer la plus grande vague de Private equity de l’histoire du Maroc nécessitera un marché boursier efficace pour les sorties des fonds qui sont en train d’être lancés. Ces sorties doivent se faire dans un horizon de 5 à 7 ans à travers des ventes sur le marché secondaire ou en Bourse. Et là, les institutionnels et les OPCVM devront être accompagnés par une demande des investisseurs particuliers pour investir dans ces PME. 


Tout ceci se prépare dès maintenant et la déductibilité des versements dans le PEA peut renverser rapidement la situation et créer cet engouement tant attendu.

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