• BKGR procède à la cartographie de l’impact des hausses des taux d’intérêt en 2023 sur les secteurs de l’immobilier et la distribution automobile au vu de leur lien étroit avec la dynamique de crédit.
• Une baisse du pouvoir d'achat et des difficultés d'accès au crédit mettent en difficulté ces secteurs.
Depuis 2022, avec la flambée des prix des matériaux de construction et du foncier dans un contexte inflationniste post crise sanitaire, le coût de revient des opérateurs a considérablement augmenté. Les prix de vente ont donc augmenté, ce qui a mis plusieurs entreprises immobilières en difficulté. Les matériaux ont connu une forte appréciation, atteignant +190% pour le verre, +60% pour le cuivre, +50% pour l’aluminium, +30% pour les câbles électriques, +25% pour le bois et +20% pour le fer à béton. La direction de la promotion immobilière a enregistré une amélioration de la production de +2,1%, soit 111.216 unités d’habitation, contre 108.953 unités l'année précédente. Les mises en chantier, en revanche, ont connu un repli de -13,6%, soit 97.886 unités d’habitation, au terme des six premiers mois de l’année 2022.
En raison d'une diminution de leur capacité financière, de nombreux ménages reportent la décision d'acheter un bien immobilier et redirigent leur consommation vers des besoins essentiels. Une enquête de l'HCP a révélé que 83,1% des ménages ont déclaré une baisse de leur niveau de vie au cours des 12 derniers mois, ce qui a un impact sur leurs décisions d'achat de biens durables. De plus, la difficulté d'accès au crédit en raison d'un endettement élevé affecte également la demande de biens immobiliers. Le retard dans l'adoption de nouvelles incitations pour le secteur par le gouvernement crée également de l'incertitude parmi les opérateurs et les acheteurs. Ces incitations comprennent des logements subventionnés pour les ménages à faible et à moyen revenu, mais aucune clarification n'a été faite sur les détails de ces programmes. L'indice de confiance des ménages a diminué de 24% YoY (year-on-year) à 46,6 points au T4 2022, reflétant les défis auxquels sont confrontés les ménages dans le contexte économique actuel.
Les problèmes financiers des ménages ont conduit à une augmentation de la location de maisons secondaires, entraînant une surabondance de l'offre locative et contribuant à la baisse des prix et au report des investissements des acheteurs. Les ventes de biens immobiliers d'occasion ont augmenté de 45% au troisième trimestre 2022, ce qui s'explique par la visibilité, le risque maîtrisé et la capacité de négociation directe avec le vendeur. Enfin, plusieurs promoteurs immobiliers ont redimensionné leurs projets et mis en arrêt des chantiers en raison du manque d'engouement des acheteurs en 2022, avec une baisse des dépôts d'autorisations de construction et de mises en chantier d'au moins 50%, ainsi qu'une tendance baissière des ventes de ciment.
Pour rappel, la hausse des taux de la Banque centrale a conduit BMCE Capital Global Research à revoir sensiblement à la baisse le potentiel de son scope de 40 valeurs, qui comprend les titres des trois sociétés opérantes dans le secteur de la «participation et promotion immobilières», à savoir ADH, ADI et RDS.
Par société, la valorisation de Addoha a passé de 10DH à 7DH, Alliances dont la nouvelle valorisation est de 53 DH (ancienne valorisation: 87 DH), et RDS qui passe de 20 DH à 15 DH.
Du côté de la distribution automobile, la hausse des taux d’intérêts devrait indéniablement peser davantage sur la demande en 2023 et avoir un impact direct sur les différentes parties prenantes du marché, notamment les distributeurs, les fabricants, les concessionnaires et les consommateurs.
Selon les derniers chiffres publiés par BAM, le taux des crédits à la consommation ressort en quasi-stagnation au T4 2022 à 6,40% (vs. 6,39% au T3 2022). En tenant compte d’une seule hausse du taux directeur, les taux des crédits automobiles devraient enregistrer une hausse de 25 pbs en 2023 pour s’établir à 6,65%.
Ainsi, la contraction de la demande enregistrée devrait perdurer dans un contexte macroéconomique contraignant puisque les ménages devraient choisir entre prolonger la durée de vie de leurs véhicules dans l’absence de promotions sur le marché du neuf ou s’orienter vers le marché de l’occasion qui répond à la demande des ménages avec des prix plus accessibles. Selon le ministère du Transport et de la Logistique, le nombre de mutation des véhicules d’occasion se serait amélioré de +1,5% en 2022 pour atteindre un volume de 627.000 unités suite au bond de +25% enregistré à fin 2021.
En 2023, le secteur de la distribution automobile devrait être pris en tenaille par l’augmentation prévue des prix des ventes des véhicules neufs de +15%, ce qui devrait impacter positivement le CA des acteurs qui relèvent le prix de certaines gammes et se focalisent sur les véhicules à forte valeur ajoutée pour compenser le manque à gagner dans un contexte de rareté, d’où l’effet prix positif.
En revanche et dans l’optique de conservation des parts de marché, les opérateurs pourraient appliquer des baisses des prix de vente de certaines gammes disponibles, générant ainsi un impact négatif direct sur les marges.