L'A400M, premier avion militaire stratégique de la gamme d'Airbus, est marqué par une série de malédictions depuis ses débuts. Le crash survenu le 9 mai à Séville, en Espagne, et qui a fait 4 morts, en est une de plus.
Déjà en 2010, Airbus avait failli jeter l'éponge. Tom Enders, le patron d'Airbus, avait menacé d'abandonner le programme, lancé en 2003, si les sept pays à l'origine (Allemagne, France, Espagne, Royaume-Uni, Belgique, Luxembourg et Turquie) n'acceptaient pas de partager les surcoûts : 6,2 milliards d'euros, soit 30% du budget initial
Le groupe s'interrogeait alors sur la pertinence même de ce programme dont le coût explosait et qui commençait à connaître des retards.
Si aujourd'hui l'existence même de ce programme n'est pas remise en cause, avec 174 appareils commandés et 12 déjà livrés, le programme connaît toujours des difficultés.
Des retards de livraisons
A tel point que, en janvier, Tom Enders a dû présenter des excuses aux autorités britanniques pour les retards dans les livraisons, avant d'annoncer une réorganisation complète de sa filiale Airbus Defence and Space.
"Nous faisons face à des retards dans les livraisons et dans le développement des capacités militaires", avait-il déclaré lors de voeux à la presse. "Ce n'est pas une catastrophe mais c'est suffisamment significatif", ajoutait-il en assurant que son groupe travaillait "aussi dur que possible pour prendre des mesures correctives".
Dans la foulée était annoncé le départ du directeur de cette branche aviation militaire Domingo Ureña Raso, et son remplacement par Fernando Alonso, jusque-là en charge des essais en vol.
Airbus DS a promis que "le programme A400M sera restructuré (...) pour permettre une meilleure efficacité au sein de la division d'Airbus DS et pour permettre au programme A400M (...) de répondre au mieux aux manquements actuels".
Il devait communiquer fin février/début mars un nouveau calendrier de livraison, mais ce dernier n'est toujours pas connu. Le groupe a aussi dû passer une provision de 551 millions d'euros sur son exercice 2014 pour prendre en compte les nouveaux retards enregistrés par l'A400M.
Des clients impatients
L'A400M est un appareil avec une motorisation complexe et des demandes techniques divergentes selon les pays clients.
Le groupe a subi de vives critiques de la part de ces derniers. Comme en Grande-Bretagne, par exemple, qui a commandé 22 appareils et en attendait sept en 2015, et où Tom Enders a présenté ses excuses.
Comme en Allemagne aussi, de la part de la ministre de la Défense, Ursula von der Leyen, qui a souligné, fin janvier dans Der Spiegel, qu'il y avait "plus en jeu que la seule image d'une entreprise industrielle, il est question de la fiabilité de l'Allemagne dans ses alliances" militaires.
Après environ quatre années de retard, l'Allemagne a reçu en décembre le premier A400M sur les 53 qu'elle a commandés. D'après Der Spiegel, le contrôle par l'armée de l'appareil a décelé "875 manquements", dont des gaines isolantes manquantes sur certains câbles électriques ou d'autres beaucoup plus anecdotiques comme des moisissures sur l'évier.
Transformer les opérations militaires
Pour autant c'est un "bijou technologique", assurait en 2013 le ministre de la Défense Jean-Yves Le Drian, lorsque la France a pris livraison de son premier A400M.
L'A400M "va transformer la manière dont fonctionnent les opérations militaires", expliquait à l'AFP Ian Elliott, alors vice-président d'Airbus Military, car "pour la première fois, il permettra de livrer des équipements de combat directement sur place".
Équipé de quatre turbopropulseurs, l'A400M peut transporter jusqu'à 37 tonnes sur 3.300 kilomètres, se poser sur des terrains non préparés comme le sable, avec à son bord des blindés ou des hélicoptères. Au total, 174 avions ont été commandés par huit pays à ce jour. Airbus DS assure avoir des "prospects exports qui vont se réaliser en 2015".