L'Arabie saoudite compte vendre pour plus de 10 milliards de dollars d'actions du géant pétrolier Aramco, au moment où le royaume cherche à financer une vaste transformation de son économie au-delà du pétrole.
Le gouvernement va mettre sur le marché quelque 1,5 milliard d'actions du groupe, représentant 0,64% du capital, selon un communiqué jeudi.
Il s'agit de la deuxième vente d'actions sur le marché depuis l'entrée en Bourse d'Aramco en décembre 2019, la plus grosse opération de ce type de l'histoire. Elle avait rapporté 25,6 milliards de dollars, pour 1,5% du capital, à un prix de 32 rials par action.
La nouvelle vente, qui devrait être comprise entre 26,70 et 29,00 rials saoudiens par action (7 à 7,70 dollars), doit être lancée dimanche. C'est moins que les 29 rials que valait jeudi l'action, qui évolue à son niveau le plus bas depuis plus d'un an.
Les actions seront proposées à des investisseurs institutionnels locaux mais également étrangers, précisent le gouvernement et le groupe. Un dixième des actions "seront proposés à des investisseurs de détail". Le début des échanges à la bourse de Ryad est prévu pour le 9 juin.
Il s'agira d'un test majeur pour l'attractivité du groupe pétrolier sur la scène financière internationale. En cas de forte demande, la vente pourrait atteindre jusqu'à 0,7% du capital d'Aramco, dont le gouvernement détient actuellement 82%, et le fonds souverain saoudien 16%.
Le placement pourrait rapporter au total jusqu'à près de 12 milliards de dollars.
"Le gouvernement recevra l'intégralité des recettes" de l'opération, selon le communiqué. Ces fonds devraient contribuer à financer Vision 2030, le vaste programme de réformes économiques et sociales du prince héritier Mohammed ben Salmane, visant à diversifier l'économie saoudienne et à la préparer à l'ère post-pétrole.
Parmi les projets du prince Mohammed, qui veut transformer le royaume conservateur en un centre d'affaires et de tourisme: Neom, une mégapole futuriste de 500 milliards de dollars en cours de construction dans le désert.
La vente "aidera le gouvernement à lever des fonds pour les projets de Vision 2030", a confirmé Amena Bakr, analyste chez Energy Intelligence, qui s'attend à d'autres ventes dans les années à venir.
Elle "constituera un soutien matériel pour les finances publiques", a déclaré Justin Alexander, directeur du cabinet de conseil Khalij Economics.
"Toutefois, il ne s'agit que d'une petite partie des dépenses requises pour les projets au cours des prochaines années (...) de sorte qu'il pourrait y avoir d'autres ventes d'actions", a aussi jugé M. Alexander.
Premier exportateur mondial de brut, l'Arabie saoudite produit actuellement environ neuf millions de barils par jour (bpj), bien en dessous de sa capacité de 12 millions de bpj, en raison des coupes de production décidées pour soutenir les cours.
Cette politique a pesé sur les bénéfices d'Aramco, qui ont baissé de 14,5% au premier trimestre sur un an, à 27 milliards de dollars.
En janvier, le gouvernement avait demandé à Aramco de maintenir sa capacité de production de pétrole à 12 millions de barils par jour, abandonnant l'objectif, annoncé en 2021, de 13 millions d'ici à 2027.
Le PIB de l'Arabie saoudite a baissé de 1,8% sur un an au premier trimestre 2024 par rapport à 2023, selon l'Autorité générale des statistiques, en raison principalement du recul des activités pétrolières.
Le FMI a estimé en avril que, compte tenu des niveaux de production actuels, le seuil de rentabilité budgétaire de l'Arabie saoudite serait de 96,2 dollars le baril en 2024 - au-dessus des niveaux actuels de quelque 80 dollars.
En conséquence, le ministère saoudien des Finances prévoit des déficits budgétaires jusqu'en 2026, en raison des dépenses élevées liées aux réformes.