Le Salon de l’épargne était l’occasion pour le public d’échanger avec Ahmed Rochd, Head of Equity Research chez Valoris Securities, sur le secteur immobilier à l’aune des nouvelles aides au logement. Il faut dire que le secteur a connu une décennie de recul des mises en chantier. «Actuellement, le secteur de la construction se trouve à son niveau le plus bas, avec une production annuelle de 200.000 unités, inférieure même au rythme de production qui a précédé la première génération d’aides visant le logement social. Parallèlement, le déficit en matière de logement, en baisse constante depuis 10 ans, a connu en 2022 un rebond, témoignant de l’arrivée sur le marché d’une nouvelle demande, alors que l’offre est au plus bas». Pour l’analyste, cette configuration est idéale pour amorcer un nouveau cycle.
Les promoteurs poussés à s’assainir
La phase baissière de ce secteur économique important a été accompagnée par un resserrement des conditions financières, les banques ayant décidé de réduire la voilure en matière de financements. Des restrictions qui ont mis à nu les difficultés de certains promoteurs, qui ont dû faire un effort sur leur structure financière pour continuer à survivre. Pour Ahmed Rochd, cette situation aurait pu être pire si les banques n’avaient pas continué à financer les acquéreurs avec des conditions de plus en plus avantageuses. En témoigne la baisse des taux débiteurs de plus de 180 points de base sur la période. Tout cela a donc poussé les promoteurs, surtout ceux cotés, à se réinventer et à améliorer leurs structures financières. Ainsi, le taux d'endettement (Gearing) du secteur a diminué de 120% en 2013 à 44% en 2022. Simultanément, la taille cumulée du bilan des trois sociétés immobilières cotées s'est contractée de 36% au cours des neuf dernières années. Cette diminution découle directement de la réduction des activités du secteur, symbolisée par le ralentissement des mises en chantier. Actuellement, les actifs à disposition des sociétés immobilières ne génèrent plus le même chiffre d'affaires qu'en 2013. En effet, le rendement des actifs du secteur s'établit à 8,6% (comparé à 23% en 2013), tandis que le retour sur actifs se limite à 0,4% en 2022 (contre 4% en 2013). Pour Ahmed Rochd, c’est le principal défi des promoteurs immobiliers : augmenter leur capacité à générer plus de chiffre d’affaires avec moins d’actifs.
Désormais, avec une structure assainie, dégager une meilleure rentabilité est à portée de main. En effet, l'introduction d'un nouveau programme d'aides, prévu pour s'étendre sur la période 2024-2028, est considérée comme un catalyseur majeur pour le secteur immobilier. Cette initiative s'inscrit dans la continuité des politiques antérieures dédiées au secteur, et se distingue par une approche plus souple en termes de superficie des logements, sans imposer de quota minimum d'unités à produire pour les promoteurs immobiliers. Contrairement aux anciens programmes de logements sociaux, ce nouveau projet cible exclusivement l'acquéreur, en n’offrant plus d'avantages fiscaux aux promoteurs. Cette formule diffère du modèle précédent qui, entre 2010 et 2020, était exclusivement destiné aux ménages à faibles revenus. En revanche, cette récente approche vise à apporter un soutien financier aux acheteurs de la classe moyenne, marquant ainsi un tournant majeur dans le secteur de l'immobilier. Car, pour la première fois de l’histoire, la classe moyenne est visée. Dans un tel cas, cela ne peut être que positif.
Immobilier coté : Un secteur en vogue
L’immobilier est le secteur star de cette année 2023 en Bourse. L’indice sectoriel gagne 116% depuis le premier janvier, et les entreprises du secteur reviennent petit à petit dans les papiers des analystes financiers, qui ont pendant longtemps, et à juste titre, évité de couvrir le secteur. Les investisseurs garderont désormais un œil sur les amendements du projet de Loi de Finances 2024, en espérant voir l’introduction d’un changement concernant les permis d’habiter pris en compte dans les aides. Il est espéré plus de souplesse, au moins sur les biens dont la valeur est supérieure à 300.000 DH, pour ne pas condamner les stocks antérieurs des promoteurs. A suivre !