Le Maroc est en outre sujet aux inondations : 20 évènements majeurs ont ainsi été enregistrés au cours des deux dernières décennies, avec des pertes directes moyennes estimées à 450 millions de dollars par an et des effets qui ont touché plus durement les ménages vulnérables. L’élévation du niveau de la mer aggrave les inondations dans les zones côtières, qui abritent plus de 65 % de la population et concentrent 90 % de l’industrie. Bien que le Maroc se soit doté d’un système sophistiqué de gestion et de financement des risques de catastrophe, celui-ci n'est pas encore pleinement opérationnel. Selon les estimations du rapport, un niveau optimal d’investissements dans la gestion du risque de catastrophe permettrait de couvrir l’équivalent de 15 à 20 % des pertes moyennes annuelles, soit un montant annuel d’investissement moyen compris entre 67 et 90 millions de dollars.
Par ailleurs, afin de décarboner l’économie à l’horizon 2050, le rapport met l'accent sur la réduction de la dépendance aux combustibles fossiles et le déploiement massif de l’énergie solaire et éolienne. Selon ses projections, plus de 85 % de l’électricité pourrait être produite à partir d’énergies renouvelables d’ici 2050, contre 20 % en 2021. Avec, à la clé, la création d'au moins 28 000 emplois nets par an (soit 140 000 emplois en cinq ans) dans les seuls secteurs du renouvelable et de l’efficacité énergétique. Les gains sur le front de l’emploi pourraient même être supérieurs en tenant compte du développement de l’hydrogène vert, de la mobilité électrique ou d’autres investissements industriels verts.
Le rapport évalue à environ 53 milliards de dollars le coût de la décarbonation au cours des trois prochaines décennies, sachant que ces investissements seront en grande partie pris en charge par le secteur privé, sous réserve de la mise en œuvre de politiques sectorielles adaptées. L’impact économique net serait cependant positif : réduction des importations de combustibles fossiles et d'ammoniac, sécurité énergétique accrue, diminution de la pollution atmosphérique et moindre vulnérabilité aux chocs internationaux sur les prix des hydrocarbures. La décarbonation pourrait permettre au Maroc de devenir un exportateur net d’énergie verte et d’hydrogène vert et de faire du royaume un pôle d’investissements et d'exportations industriels verts, notamment vers l’Union européenne.
Les besoins d’investissement en matière d’atténuation et d’adaptation nécessiteraient environ 23,3 milliards de dollars d’ici 2030 (dont les deux tiers consacrés à l’adaptation), 25 milliards de dollars entre 2031 et 2040, et 29,5 milliards de dollars entre 2041 et 2050. Les investissements pour les besoins d’adaptation sont particulièrement importants dans les zones rurales, où les changements induits par le climat (baisse de la quantité d'eau disponible et des rendements agricoles) pourraient conduire à l’exode de plus de 1,9 million d’habitants (soit environ 5,4 % de la population totale du pays) d’ici 2050. Si les mesures d’adaptation peuvent contribuer à limiter le nombre de ces migrants climatiques, le Maroc devra s’attacher à agir pour offrir des opportunités d’emploi plus nombreuses et diversifiées en milieu rural.
Le Maroc a lancé plusieurs plans et stratégies visant à relever les défis climatiques : le Plan Maroc Vert en faveur d’une agriculture climato-intelligente, la Stratégie énergétique nationale, axée sur le déploiement des énergies renouvelables, la Stratégie nationale de développement durable 2030 et le Plan national pour le climat 2030.
« Le CCDR montre comment le Maroc peut faire fond sur les efforts déjà déployés pour passer à la vitesse supérieure et s’engager dans une transition ambitieuse vers un avenir résilient et sobre en carbone qui ne laissera personne au bord du chemin. Les avantages potentiels d’un modèle de croissance durable en termes de création d’emplois et d’inclusion sont importants. Dans le même temps, les besoins d’investissement pour une telle transition seront également importants, et la création d’un environnement favorable pour le secteur privé sera vitale », conclut Jesko Hentschel, directeur des opérations de la Banque mondiale pour le Maghreb et Malte.
Note : Tous les chiffres relatifs aux investissements sont exprimés en valeur actualisée nette avec un taux d’actualisation de 6 %.