Le secteur de l’agroalimentaire n’échappe pas au contexte économique mondial et local. Il est en effet bien exposé aux différentes perturbations enregistrées depuis le dernier trimestre 2021. En 2022, ce secteur a affiché une perte de capitalisation de 18,4%, dans les mêmes proportions que l’indice Masi de la Bourse Casablanca.
Mais les opérateurs du secteur ont su faire preuve de résilience et certains ont même pu profiter de l’inflation. En somme, les bénéfices dégagés par ces entreprises ont augmenté de 300 MDH l’an dernier alors que leurs dividendes ont frôlé le milliard de dirhams.
Cosumar a notamment augmenté son dividende de 6 dirhams par action à 7 dirhams par action, soit un total de 661 MDH. Lesieur a également augmenté son dividende à 4,5 dirhams par action en 2022 contre 3,5 dirhams par action l'année précédente, avec un total de 124 MDH. Mutandis a maintenu son dividende à 8,5 dirhams par action, ce qui représente un total de 78 MDH. Cette dernière a enregistré des résultats historiques et devrait, selon le management, passer un nouveau cap en matière de dividendes après l’achèvement de son programme d’investissement actuel.
Performances malgré l’adversité
Les performances du secteur ont été réalisées dans un contexte difficile marqué par une hausse des prix des matières premières, une volatilité des devises et une sécheresse qui a retardé la compagne agricole.
La hausse des prix des matières premières a eu un impact négatif sur les revenus et la rentabilité des entreprises du secteur alors que la volatilité de la parité USD/MAD a alourdi les coûts des matières premières libellées en dollars, ce qui a rendu difficile la gestion des coûts. La sécheresse a également eu un impact sur les récoltes et a limité la production des entreprises.
Reflux en cours des matières premières
Après le fort rebond de l’indice des prix des matières agricoles calculé par la Banque mondiale, atteignant son plus haut niveau en avril, ce dernier affiche une baisse de 11% au T3 2022 par rapport au trimestre d'avant. Cette baisse des prix reflète une augmentation des approvisionnements suite à une amélioration des rendements, le retour poussif de l'Ukraine sur les marchés mondiaux et l'affaiblissement de la demande en réponse à la détérioration des perspectives de la croissance mondiale.
Cette tendance baissière devrait se poursuivre en 2023 selon la Banque mondiale, qui table sur un repli de 5% de l’indice des prix des matières agricoles.
Cependant, les prix des denrées alimentaires dont la plupart des monnaies nationales sont encore plus élevées en raison de l'appréciation du Dollar américain, demeurent supérieurs par rapport à leurs moyennes historiques. Mais ce dernier commence à nettement refluer, s’approchant des 10 DH pour un Dollar alors que les cambistes le voient même à 9,8 DH dans un avenir proche.
Pricing power
«Nous pensons que la performance des entreprises agroalimentaires cache une certaine disparité qui dépendrait de leur capacité à répercuter la hausse des coûts auprès des ménages», expliquaient les analystes de CDG Capital dans une note sur les perspectives du marché actions en 2023. En effet, les ménages pourraient privilégier les produits de base, ce qui engendrerait une baisse de la demande sur les autres produits. Des entreprises comme Lesieur Cristal ou Mutandis ont déjà démontré leur capacité à répercuter la hausse des coûts, même partiellement dans le cas de Mutandis.
Ces entreprises bien positionnées pour 2023
Pour 2023, la légère baisse prévue des coûts des intrants et du coût de transport devrait permettre aux sociétés agroalimentaires de voir leurs marges s’améliorer légèrement. A ce constat, nous rajoutons que les entreprises qui ont mis en place des stratégies de croissance diversifiées, pourront mieux faire face aux difficultés économiques et environnementales. Mutandis, par exemple, prévoit une croissance de son chiffre d'affaires entre 15% et 20% en 2023, si les matières premières se stabilisent à leur niveau de décembre 2022. Le groupe devrait également boucler l'acquisition de l'activité Ain Ifrane ce semestre et renforcer son positionnement sur ce segment et les différentes synergies du groupe.
Cosumar est notre autre préférence dans ce secteur. Car malgré une année de sécheresse et de hausse des prix d'achat des intrants et matières énergétiques, le groupe a pu arracher une croissance bénéficiaire grâce à des actions d'amélioration et d'innovation industrielle. Le groupe a même augmenté légèrement son dividende. La perspective de la cession de son unité industrielle en Arabie Saoudite, bien que provoquant une multitude de lectures possibles chez les investisseurs, devrait a priori se traduire par un rendement exceptionnel post-opération et améliorer le profit de la société aux yeux du marché.