EMISSION DU 10/11 - par bourse news

Immobilier coté : Le marché en veut (toujours) plus

Le climat de défiance à l'égard de l'immobilier coté dure depuis 3 ans et n'est pas prêt de s'arrêter. Ce semestre encore, les investisseurs ont accueilli les résultats à fin juin avec scepticisme, voire même, au meilleur des cas, sans grand intérêt.


Qu'ils soient annuels ou semestriels, les résultats des immobilières cotées sont attendues au tournant par les boursiers. Il faut dire que le caractère cyclique du secteur en fait un indicateur important sur la santé globale du marché boursier, comme c'est le cas pour l'économie réelle. Il est en effet rare de voir les actions des immobilières progresser dans un marché baissier ou, inversement, des indices qui progressent sans le secteur immobilier. Et justement, les années 2016 et 2017 étaient et demeurent les années du grand retour du secteur en haut du tableau des variations, tiré essentiellement par Alliances après avoir touché le fond. Pourtant, les réalisations du premier semestre dénotent d'une stagnation de l'activité. Ainsi, le secteur affiche une baisse des ventes de plus de 4% par rapport au premier semestre 2016. L'exploitation connait une dégradation plus marquée avec un résultat global en détérioration de plus de 6%. Mais le secteur dégage tout de même une profitabilité en amélioration, expliquée en partie par le rattrapage d'Alliances et celui d'Espaces Saada qui profitent d'effets de base favorables, les premiers semestres 2016 ayant été peu profitables. 


Des réserves foncières décevantes  

C'est sans doute le point qui fâche le plus la communauté des investisseurs. La réserve foncière des immobilières, dont dépendent intimement les revenus futurs, ne se constitue plus à bon rythme. La vitesse de remplacement est faible et cela constitue un risque pour le secteur. Alliances déstocke des terrains pour rembourser des dettes, alors que Espaces Saada annonce une réserve foncière stable à 1.000 ha au terme du premier semestre. Addoha a dépensé, pour sa part, une envelope de 320 MDH pour un terrain à Dar Bouazza destiné au moyen standing et un autre à Errahma. Le groupe annonce que cette enveloppe couvre également la finalisation de l'acquisition d'une réserve foncière de 90 ha à Errahma. En somme, pas de quoi renouveler les besoins de cette machine de production géante. Le secteur, qui affiche une marge opérationnelle parmi les plus élevées du marché (19,4%), plus élevée que celle des mines selon les calculs des analystes d'Upline, risque de se heurter à une raréfaction du foncier et à un nouveau cycle lourd d'investissements.

De plus, ce secteur a la particularité de stocker des charges, ce qui augmente doublement la défiance des investisseurs. "Une immobilière peut sortir à n'importe quel moment d'énormes charges d'exploitation de son chapeau", nous explique un gérant d'OPCVM qui, comme beaucoup, n'a pas augmenté son exposition au secteur cette année.  Résultat des courses : le marché a sanctionné les résultats dès leur publication. Mais le sentiment général vis-à-vis du secteur est le même : La méfiance ou - pour rester dans des termes plus orthodoxes - une prime de risque élevée sur le secteur immobilier explique sans doute que, sauf pour les valeurs en rattrapage, les immobilières cotées stagnent en Bourse indépendamment de leurs résultats. L'ensemble des promoteurs cherchent à relativiser, mais les investisseurs ont tranché : Le secteur est en crise. 

Des parcours boursiers différents 

En Bourse, hors Alliances, le secteur est peu volatil. Beaucoup de professionnels lient cela directement aux publications trimestrielles d'Addoha et Espaces Saada qui donnent de la visibilité sur l'activité. L'abondance d'informations réduit le stress du marché. Espaces Saada, beaucoup plus jeune en Bourse, paye le prix d'un placement privé effectué en Pré-IPO. Pour notre gérant, "ceux qui ont participé au placement privé sont vendeurs à ces niveaux de cours. De plus le rendement est inférieur aux attentes, ce qui réduit le potentiel de la valeur à court terme. Plus bas, elle devient bon marché. Donc le cours stagne en attendant un changement de fondamentaux susceptible d'améliorer sa valorisation". Quant à Addoha, notre interlocuteur estime qu'elle dispose de ratios de valorisation les meilleurs du secteur avec un P/E sous 14 et un rendement de 6%, là aussi le plus élevé du secteur. Mais les préjugés sont forts. "Addoha est le parfait exemple de la prime de risque élevée sur l'immobilier. Pourtant, les investisseurs se montrent peu exigeants envers le marché boursier dans sa globalité. Ce spread ne sera favorable au secteur immobilier que si la Bourse poursuit la hausse entamée en 2016". Pour Alliances, notre gérant explique l'extrême volatilité du cours (+180% depuis le début de l'année) par deux phénomènes. Le premier, défavorable au cours est que la société génère un petit bénéfice de quelques dizaines de millions de dirhams pour un chiffre d'affaires de plus de 1,5 Md de dirhams. "C'est encore fragile et la réserve foncière est faible après restructuration, ce qui limite la marge de progression à moyen long terme de l'opérationnel". Le second phénomène, qui explique les pressions à l'achat est que la valeur revient de loin. "Les rattrapages de cours sont souvent rapides et violents, cela plaît aux investisseurs privés mais pour les gestionnaires, il faut justifier le fait de courir derrière le cours. Addoha et Espaces Saada ne sont pas passés par la situation critique d'Alliances. Lorsque cette dernière sera sur des niveaux de valorisation normatifs, elle se comportera comme ses pairs. Pour l'instant, sa convalescence en fait une valeur spéculative", conclut notre source au sein de la gestion d'actifs. 

 

ADIL Hlimi

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