Jeudi 03 Novembre 2022

Stress hydrique et transition énergétique au Maroc: Les chiffres chocs de la banque mondiale

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Les investissements climatiques seront très profitables au Maroc, selon un nouveau rapport de la Banque mondiale qui estime que le montant total des investissements nécessaires pour ancrer solidement le Maroc sur une trajectoire de résilience et bas carbone à l’horizon 2050 est estimé à 78 milliards de dollars en valeur actuelle. Le rapport indique également qu’une diminution de 25 % de la disponibilité en eau dans tous les secteurs de l’économie pourrait réduire le PIB de 6,5 %.
 

Investir maintenant dans l’action climatique procurera d’importants bénéfices au Maroc, en permettant de créer de nouveaux emplois, de redynamiser les zones rurales et de transformer le pays en un pôle industriel « vert » tout en l’aidant à atteindre plus largement ses objectifs de développement.

C’est le message clé du Rapport sur le climat et le développement (CCDR) publié aujourd’hui par la Banque mondiale, qui chiffre à environ 78 milliards de dollars en valeur actuelle le montant total des investissements nécessaires pour ancrer solidement le Maroc sur une trajectoire de résilience et bas carbone à l’horizon 2050. La réalisation de ces investissements sera progressive, mais leur rentabilité considérable, faisant du Maroc un environnement attractif pour les investissements étrangers directs et un centre d’exportations, en plus de stimuler la croissance économique.

« Au vu des effets du changement climatique, le Maroc avance déjà à vive allure vers un avenir sobre en carbone, souligne Axel van Trotsenburg, directeur général des Opérations de la Banque mondiale. Ce rapport novateur met en évidence les axes prioritaires à mettre en œuvre pour mieux gérer l’eau et les autres ressources et décarboner l'économie de manière à servir en même temps les objectifs climatiques et ceux du développement. »

Les CCDR sont un nouvel outil de diagnostic de la Banque mondiale ayant pour objectif d'étudier les liens entre climat et développement et de cerner les interventions prioritaires pour renforcer la résilience et atténuer les émissions de carbone tout en soutenant la croissance économique et en réduisant la pauvreté. Le rapport consacré au Maroc est le premier publié pour un pays de la région Moyen-Orient et Afrique du Nord (MENA).

Le rapport identifie trois enjeux prioritaires en soutien à une action climatique urgente : lutter contre la pénurie d’eau et les sécheresses ; améliorer la résilience aux inondations ; et décarboner l’économie. Le rapport se penche également sur les enjeux transversaux que constituent le financement, la gouvernance et l’équité.

Le Maroc est une zone à haute vulnérabilité climatique et c’est l’un des pays du monde les plus touchés par le stress hydrique, puisqu’il se rapproche rapidement du seuil de pénurie absolue fixé à 500 m3. Les sécheresses, de plus en plus fréquentes et graves, sont une source majeure de volatilité macroéconomique et une menace pour la sécurité alimentaire. Le rapport indique par exemple qu’une diminution de 25 % de la disponibilité en eau dans tous les secteurs de l’économie, conjuguée à une baisse des rendements agricoles due aux dérèglements du climat, pourrait réduire le PIB de 6,5 %. Et de souligner que si les investissements dans les infrastructures hydrauliques revêtent une importance capitale, ils doivent s'accompagner de réformes dans le secteur de l’eau et de changements de comportement chez les consommateurs.
 

Le Maroc est en outre sujet aux inondations : 20 évènements majeurs ont ainsi été enregistrés au cours des deux dernières décennies, avec des pertes directes moyennes estimées à 450 millions de dollars par an et des effets qui ont touché plus durement les ménages vulnérables. L’élévation du niveau de la mer aggrave les inondations dans les zones côtières, qui abritent plus de 65 % de la population et concentrent 90 % de l’industrie. Bien que le Maroc se soit doté d’un système sophistiqué de gestion et de financement des risques de catastrophe, celui-ci n'est pas encore pleinement opérationnel. Selon les estimations du rapport, un niveau optimal d’investissements dans la gestion du risque de catastrophe permettrait de couvrir l’équivalent de 15 à 20 % des pertes moyennes annuelles, soit un montant annuel d’investissement moyen compris entre 67 et 90 millions de dollars.

Par ailleurs, afin de décarboner l’économie à l’horizon 2050, le rapport met l'accent sur la réduction de la dépendance aux combustibles fossiles et le déploiement massif de l’énergie solaire et éolienne. Selon ses projections, plus de 85 % de l’électricité pourrait être produite à partir d’énergies renouvelables d’ici 2050, contre 20 % en 2021. Avec, à la clé, la création d'au moins 28 000 emplois nets par an (soit 140 000 emplois en cinq ans) dans les seuls secteurs du renouvelable et de l’efficacité énergétique. Les gains sur le front de l’emploi pourraient même être supérieurs en tenant compte du développement de l’hydrogène vert, de la mobilité électrique ou d’autres investissements industriels verts.

Le rapport évalue à environ 53 milliards de dollars le coût de la décarbonation au cours des trois prochaines décennies, sachant que ces investissements seront en grande partie pris en charge par le secteur privé, sous réserve de la mise en œuvre de politiques sectorielles adaptées. L’impact économique net serait cependant positif : réduction des importations de combustibles fossiles et d'ammoniac, sécurité énergétique accrue, diminution de la pollution atmosphérique et moindre vulnérabilité aux chocs internationaux sur les prix des hydrocarbures. La décarbonation pourrait permettre au Maroc de devenir un exportateur net d’énergie verte et d’hydrogène vert et de faire du royaume un pôle d’investissements et d'exportations industriels verts, notamment vers l’Union européenne.  

Les besoins d’investissement en matière d’atténuation et d’adaptation nécessiteraient environ 23,3 milliards de dollars d’ici 2030 (dont les deux tiers consacrés à l’adaptation), 25 milliards de dollars entre 2031 et 2040, et 29,5 milliards de dollars entre 2041 et 2050. Les investissements pour les besoins d’adaptation sont particulièrement importants dans les zones rurales, où les changements induits par le climat (baisse de la quantité d'eau disponible et des rendements agricoles) pourraient conduire à l’exode de plus de 1,9 million d’habitants (soit environ 5,4 % de la population totale du pays) d’ici 2050. Si les mesures d’adaptation peuvent contribuer à limiter le nombre de ces migrants climatiques, le Maroc devra s’attacher à agir pour offrir des opportunités d’emploi plus nombreuses et diversifiées en milieu rural.

Le Maroc a lancé plusieurs plans et stratégies visant à relever les défis climatiques : le Plan Maroc Vert en faveur d’une agriculture climato-intelligente, la Stratégie énergétique nationale, axée sur le déploiement des énergies renouvelables, la Stratégie nationale de développement durable 2030 et le Plan national pour le climat 2030.

« Le CCDR montre comment le Maroc peut faire fond sur les efforts déjà déployés pour passer à la vitesse supérieure et s’engager dans une transition ambitieuse vers un avenir résilient et sobre en carbone qui ne laissera personne au bord du chemin. Les avantages potentiels d’un modèle de croissance durable en termes de création d’emplois et d’inclusion sont importants. Dans le même temps, les besoins d’investissement pour une telle transition seront également importants, et la création d’un environnement favorable pour le secteur privé sera vitale », conclut Jesko Hentschel, directeur des opérations de la Banque mondiale pour le Maghreb et Malte.

 

 

Note : Tous les chiffres relatifs aux investissements sont exprimés en valeur actualisée nette avec un taux d’actualisation de 6 %. 

 

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