S'exprimant lors d'une conférence sur les activités bancaires transfrontalières et les réformes réglementaires, tenue à Maurice, la directrice générale du FMI, Christine Lagarde, a soulevé les défis auxquels sont confrontés les régulateurs africains face à l'expansion galopante des banques transfrontalières. Verbatim.
"En tant que banquiers et contrôleurs bancaires, vous êtes conscients des vulnérabilités potentielles issues du ralentissement actuel de la croissance mondiale et régionale. La mutation du secteur financier africain au cours de la dernière décennie exige une vigilance renforcée" a déclaré Lagarde.
"Les activités bancaires transfrontalières ont enregistré une expansion impressionnante. Dix banques africaines sont désormais implantées dans au moins dix pays du continent et l’une d’entre elles est présente dans plus de 30 pays" rappelle la numéro 1 du FMI pour qui cette expansion a "inévitablement donné lieu à une complexité grandissante". Compte tenu de la diversité de régimes réglementaires entre pays se trouvant à des stades différents de leur développement financier, il n’est pas étonnant que la supervision des activités bancaires transfrontalières pose d’immenses défis. Il n’existe pas de normes de comptabilité et d’information harmonisées. Les carences statistiques sont nombreuses. Les lois nationales régissant le secret bancaire et les restrictions imposées aux flux d’informations entravent la coopération entre les autorités de supervision des pays d’origine et des pays hôtes. "Il est capital de veiller à ce que la supervision s’effectue sur une base consolidée.
Les sociétés holding bancaires ont leur siège dans un pays et leurs filiales dans la région sont soumises aux lois et réglementations des pays hôtes. "Cette configuration confère une lourde responsabilité aux autorités chargées au premier chef de la supervision des holdings. Par ailleurs, il est essentiel que les pays hôtes soient informés et consultés, et que leurs autorités de supervision soient impliquées" a dit Lagarde.
Les dispositifs et mécanismes de résolution bancaire souffrent de lacunes dans de très nombreux pays, lacunes encore plus manifestes au niveau régional. Ces insuffisances prennent une dimension encore plus grande au regard du ralentissement marqué de la croissance africaine ces derniers temps. "Je sais que tous les banquiers centraux, superviseurs et responsables bancaires ici présents sont parfaitement conscients de ces problèmes. D’ailleurs, vous avez déjà pris d’importantes mesures".
"Plusieurs d’entre vous, dont le pays abrite le siège de groupes bancaires panafricains, ont mis sur pied des collèges de surveillance. Grâce à ces organes, vous avez la possibilité de mener avec les superviseurs des pays hôtes une évaluation plus exhaustive des risques au cas par cas. Les superviseurs des pays d’origine doivent veiller au bon fonctionnement des collèges de surveillance. Ils doivent également s’assurer que les pays hôtes soient informés et régulièrement consultés. De leur côté, les superviseurs des pays hôtes doivent eux aussi jouer un rôle actif dans ce processus de collaboration. Les superviseurs des pays d’origine doivent mesurer l’impact de leurs décisions sur les pays hôtes de plus petite taille".
Il est encourageant aussi de constater que les pays d’Afrique de l’Est ont élaboré un modèle pour l’harmonisation des données et pratiques de supervision dans le cadre des efforts qu’ils déploient pour créer une communauté économique intégrée. On ne peut que se réjouir de ces initiatives. Le défi consiste désormais à s’appuyer sur les réussites des pays où des mesures ont déjà été prises et à étendre ce travail à l’ensemble de l’Afrique subsaharienne.