-De par sa nature complexe et multiforme, l’inflation pourrait resurgir à tout moment, poussée par des forces extérieures et des chocs internes. Pour Bank Al-Maghrib, les risques inflationnistes sont «orientés à la hausse». Explications.
Si les derniers indicateurs économiques laissent entrevoir une accalmie sur le front de l'inflation au Maroc, il serait naïf de croire que la tempête est définitivement derrière nous. Bien que la politique monétaire de Bank Al-Maghrib (BAM) ait, en grande partie, permis de contenir la hausse des prix, les menaces d'un retour de l’inflation demeurent réelles. Du moins, c'est ce qu'explique BAM, qui malgré une prévision de stabilisation de l’inflation sous-jacente autour de 2% pour les deux prochaines années, reste vigilante face au spectre d'une résurgence rapide et inattendue, qui continue de planer sur l'économie nationale.
En effet, après avoir atteint des sommets en 2022 et 2023, avec des taux d’inflation respectivement de 6,6% et 6,1%, l'institution monétaire anticipe une décélération notable en 2024, avec un taux projeté à 1,3%. Cette baisse est principalement due à la diminution des prix des produits alimentaires à prix volatils, un facteur essentiel dans la formation des prix au Maroc. Toutefois, cet optimisme pourrait rapidement se heurter à la réalité des chocs exogènes, dont l’économie nationale reste vulnérable. Comment ?
«Des risques restent orientés à la hausse»
Les tensions géopolitiques mondiales, notamment la crise énergétique liée au conflit en Ukraine, ou encore les perturbations engendrées par la guerre au Moyen-Orient, continuent de peser lourdement sur les perspectives d’inflation, selon BAM. Les chaînes d'approvisionnement restent sous pression, et tout nouveau choc pourrait se répercuter rapidement sur les prix des matières premières, y compris les denrées alimentaires.
Sur le plan national, l’un des principaux facteurs de volatilité pour l’inflation reste le climat. La récurrence des sécheresses, accentuée par le stress hydrique, pourrait faire grimper les prix des produits agricoles, alimentant ainsi de nouvelles tensions inflationnistes. Les projections de BAM soulignent un risque accru à ce niveau, avec une possible accélération des prix des denrées alimentaires à l’horizon 2025. Le décompensation graduel du gaz butane pourrait également contribuer à la hausse des tarifs réglementés, avec une augmentation prévue de 4% en 2025.
Dans sa balance des risques, la Banque centrale écrit que «quant à l’inflation, les risques restent orientés à la hausse. En plus des pressions externes, les sécheresses récurrentes et l’aggravation du stress hydrique pourraient engendrer une augmentation significative des prix des denrées alimentaires, exacerbant ainsi les pressions inflationnistes»
Ainsi, si les efforts pour stimuler l'investissement à travers des projets structurants sont susceptibles de soutenir la croissance à moyen et long terme, ils ne suffiront pas à neutraliser ces menaces. La gestion de l’eau et la résilience face aux chocs climatiques deviennent des impératifs non seulement pour garantir la stabilité économique, mais aussi pour éviter une flambée incontrôlée des prix alimentaires.
Au final, bien que l’inflation soit actuellement sous contrôle, elle reste un phénomène complexe et imprévisible. Les chocs externes et internes peuvent, à tout moment, renverser la tendance actuelle. Si la politique monétaire a permis d’apporter un peu de répit, la prudence reste de mise. Les incertitudes hydriques, géopolitiques, et économiques exigent une observation continue et une capacité à réagir rapidement. Autant dire que nous ne sommes pas encore sortis de l’auberge.