Dans la tête d'un entrepreneur, la Bourse est souvent perçue comme un territoire réservé aux grandes industries et aux multinationales. Loin d’être une évidence pour toutes les entreprises, elle suscite des appréhensions, des doutes et parfois même un rejet catégorique, souvent pour de mauvaises raisons. C'est précisément le point de départ de l'aventure de Dari Couspate en Bourse.
Son directeur général, Hassan Khalil, fils du fondateur Mohammed Khalil, a raconté cette success story lors d'une rencontre vendredi dernier. "Initialement, l’idée d’une introduction en Bourse n’était même pas une option envisagée pour nous. Nous souhaitions étudier nos options, y compris la possibilité d'une cession, en considérant d'autres alternatives telles que l’entrée d’un fonds d’investissement. La Bourse nous apparaissait comme un monde complexe et mystérieux, réservé à l'élite. Les craintes étaient nombreuses : divulgation des clients, transparence accrue, obligations réglementaires, etc.", témoigne-t-il devant des industriels.
Paradoxalement, si les enfants étaient perplexes, le père Khalil était, lui, beaucoup plus enthousiaste. "Il a été rapidement convaincu des avantages de la cotation", se souvient son fils.
A y regarder de plus près, l’industrie agroalimentaire a une longue histoire avec les marchés financiers. Dès 1873, Nestlé effectuait son IPO sur la Bourse de Zurich, marquant ainsi le début d’une longue relation entre l’agro-industrie et le financement boursier. Depuis plus d’un siècle, la Bourse a joué un rôle clé dans la structuration de cette industrie, notamment pour le financement des infrastructures essentielles comme les abattoirs ou les chaînes d’approvisionnement.
Aujourd’hui, l’agro-industrie représente environ 25 % de l’industrie marocaine, en termes de valeur ajoutée et de contribution à l’économie nationale, dépassant même certains secteurs phares comme l’automobile. Pourtant, peu d’entreprises du secteur choisissent la Bourse comme source de financement. Mais des sociétés comme Dari Couspate ou Cartier Saada ont sauté le pas.
L’un des effets les plus structurants de l’entrée en Bourse réside dans l’amélioration de la gouvernance. Dari Couspate a été amenée à intégrer des administrateurs indépendants, ce qui aurait été inimaginable auparavant. Cette évolution a offert un regard neuf sur la gestion et la stratégie, avec des décisions mieux éclairées et un pilotage plus rigoureux. "La gouvernance s’est professionnalisée, apportant un bénéfice considérable en termes de transparence et de structuration", confirme le Directeur général de la société.
Pour les PME, cette évolution est essentielle. Au quotidien, les équipes dirigeantes sont souvent absorbées par l’opérationnel et manquent parfois de recul sur certaines décisions stratégiques. L’apport d’une gouvernance structurée, sous l’impulsion des règles du marché, permet de renforcer la résilience de l’entreprise et d’assurer sa pérennité.
L’introduction en Bourse a également permis à Dari Couspate un gain de crédibilité indéniable, tant au niveau bancaire que commercial. Dans leurs interactions avec les autorités, les clients et les partenaires étrangers, le fait d’être coté s’est révélé être un facteur de différenciation majeur. De nombreuses portes se sont ouvertes, y compris à l’international.
L’expérience de Dari Couspate est une preuve tangible que la Bourse n’est pas uniquement réservée aux grandes structures. Bien sûr, elle impose des contraintes et demande une certaine maturité de gestion, mais elle offre en retour une visibilité accrue, un accès facilité aux financements et une amélioration structurelle de la gouvernance.
Dari Couspate affiche une capitalisation boursière de un milliard de dirhams pour près de 900 MDH de chiffre d'affaires. Le management annonce régulièrement des opérations de croissance externe bien négociées et à fort impact sur la rentabilité. En Bourse, les investisseurs considèrent Dari Couspate comme une entreprise bien gérée, opérant dans un secteur à haut potentiel, avec une marque qui s'exporte un peu partout dans le monde.
Le titre gagnerait bien plus en visibilité s’il était plus liquide.