La demande de consultation présentée par la Tunisie à l’Organisation mondiale du commerce (OMC) contre la mesure antidumping provisoire imposée par le Maroc sur les importations de cahiers originaires de Tunisie, est à la fois «surprenante» et «contestable», a déclaré Jalil Benddane, président de l’Association des fabricants de cahier au Maroc (AFCM), qui tenait un point presse cet après-midi, afin de préciser sa position dans ce différend qui oppose les deux pays.
Benddane a indiqué que la Tunisie a tenté de «politiser» un débat qui reste avant tout commercial et technique. «Déposer une plainte à l’OMC contre une décision qui n’est que provisoire semble avoir uniquement pour but d’entraver le bon déroulement de l’enquête», a-t-il ainsi déploré. Le responsable a par ailleurs précisé que l’autorité de tutelle, à savoir le ministère de l’Industrie, a souhaité étendre la durée de son enquête, conformément aux règles anti-dumping OMC et marocaines, afin de pouvoir bénéficier de davantage de temps pour apprécier les points jugés complexes de cette enquête.
Une industrie en péril
«S’il n'y a vraiment pas de pratiques de dumping de la part des exportateurs tunisiens, pourquoi ne le prouvent-ils pas auprès des autorités marocaines», s’est demandé le DG de la MAPAF, l’une des trois sociétés membres de l’AFCM.
La notion du dumping selon l’OMC, ajoute-t-il, est de vendre à l’export moins cher que sur le marché local et que cela provoque des dommages sur le marché cible. «C’est le cas, affirme-t-il. Plusieurs sociétés ont fermé boutique, nous sommes les seuls rescapés et nous ne sommes pas prêts de fermer nos usines» prévient-il.
Et de poursuivre : «Nous étions plus d’une quinzaine, nous ne sommes plus que trois (Mapaf, Med Paper et Promograph : ndlr)».
Autre argument de taille brandit par les industriels marocain : la décision des autorités marocaines d’imposer des mesures antidumping provisoires sur les importations tunisiennes a été adoptée sur la base de données communiquées par les exportateurs tunisiens et dans le strict respect du contradictoire.
Les griefs de la profession
Le président de l’AFCM n’a pas manqué d’établir une liste des principaux reproches faits aux exportateurs tunisiens :
- Les prix à l’export pratiqués par les exportateurs tunisiens sur le marché marocain sont extrêmement bas et systématiquement les moins élevés, comparativement aux autres importations.
-La Tunisie écoule massivement ses produits sur le marché marocain, comme en atteste les statistiques du T1 2018, qui n’ont pas été dévoilés par le président de l’association. Il fait savoir en revanche que «le Maroc a une capacité installée de 26.000 tonnes, ce qui pourrait largement suffire à alimenter notre marché, qui est de l’ordre de 21.000 tonnes».
-Les importations tunisiennes de cahiers s’accaparent près de 90% des importations totales de cahiers au Maroc.
-Le marché marocain représente plus de 80% du volume total des exportations tunisiennes de cahiers dans le monde.
Benddane affiche sa confiance dans son ministère de tutelle. Dans une récente rencontre avec les médias, le porte-parole du gouvernement, Mustapha El-Khalfi, a expliqué en effet que «le gouvernement est en droit de protéger les entreprises marocaines face au dumping tunisien. Nous sommes prêts à engager toute voie susceptible de les défendre».
Au final, les producteurs marocains appellent à ce que les débats relatifs à cette procédure administrative soient circonscrits aux seuls aspects «techniques» du dossier, et que l’impartialité de la procédure soit préservée face aux «pressions politique que tentent d’exercer la Tunisie».