La facture de la crise sanitaire va être salée pour l’économie marocaine. Mais cela, les cours en en tiennent déjà compte, du moins en partie.
Le déconfinement progressif et la récente baisse des cours supportent par ailleurs la Bourse dans son rebond alors que les perspectives restent incertaines.
"Nous n’avons pas une visibilité claire sur ce qui va se passer”, estime Rachid Outarriate, directeur général de CDG Capital Bourse lors d'un webinaire "sur les comportements des marchés boursiers face au COVID19". Pour lui, les investisseurs attendent plus de visibilité de la part des autorités pour la relance de chaque secteur.
Des marchés tirallés entre TINA et FOMO
Ceci dit, la faiblesse des taux ne laisse en réalité que peu de choix aux investisseurs. Un phénomène que Ouissem Barbouchi, Président de OBAFRICA Asset Management, un fonds spécialiste des marchés boursiers africains, a appelé “TINA”, acronyme de (There is no alternative). Sans alternative de rendement dans les autres compartiments, les investisseurs acceptent de se tourner vers les actions. Ces derniers se positionnent également sur les actifs risqués de peur de rater la prochaine hausse, concept appelé “FOMO” (Fear of missing out).
Maintenant, le marché actions commence à offrir des opportunités à ceux qui regardent plus loin, bien que le contexte ne soit pas très favorable.
Thématiques prometteuses
Technologie, distribution, agroalimentaire...ces 3 thématiques se sont distinguées en temps de crise. "Les secteurs de consommation de base, et les sociétés qui ont un bon bilan (trésorerie nette positive...) ont bien tenu durant la crise”, explique Ouissem Barbouchi.
Passée cette période de tumultes, des tendances commencent à se dessiner parmi les secteurs. “Des acteurs de la distribution moderne, en l’espace de 3 mois ont gagné 2 à 3 ans de développement”, note Barbouchi.
Le spécialiste conseille aussi le secteur des paiements et celui des télécommunications.
Selon lui, d’autres secteurs bien que durement touchés par la crise vont finir par rebondir à moyen terme grâce aux plans de relance... Barbouchi cite par exemple “l’infrastructure”, qui en plus “créé beaucoup d’emplois et d’investissements”.
En résumé, 4 thématiques sont scrutés par le gérant : l'émergence de la classe moyenne, le retour à la normale, les leaders et l’expansion régionale.
Les “longs trends” pour l’Afrique sont l’assurance -du fait de la faiblesse du taux de pénétration-, l’infrastructure avec une préférence pour des entreprises avec des histoires comme Jet Contractors dont l’exposition est de 50% au secteur public ou encore la consommation de base. Ces derniers disposent de niveaux de valorisation très attractifs, à l’image de Jet Contractors qui affiche un PE de 5.
Secteur bancaire : divergences d’avis
Les services financiers est une thématique recommandée bien que dessus, les avis divergent. Des stratégistes estiment en effet que l’accélération des impayées provoquées par la crise va compromettre l’évolution du secteur.
Par contre, Zin Bekkali, CEO & CIO de Silk Invest, pense que “les banques et les sociétés de financements vont profiter sur le long terme, avec beaucoup de potentiel de croissance”.
Pour lui, “les gouvernements vont augmenter leurs investissements. Et les taux d’intérêt et l’inflation vont baisser. Ce qui est profitable pour le secteur bancaire”.
Les télécoms, les techs et les assureurs qui ont démontré leurs capacités à résister, sont à maintenir dans les portefeuilles pour le spécialiste.
En revanche, l'immobilier et l’infrastructure, “dépendent du retour à la normale de l’activité économique”. Le secteur des ciments, lui, se présente comme une opportunité d’investissement “tactique” du fait d’un important besoin qui reste à couvrir.
Au-delà de ses convictions, Bekkali explique que “c’est plutôt le retour du marché vers ses niveaux normatifs qui sera le plus déterminent en termes d’investissement”. Et de conclure : “la valorisation actuelle de chaque secteur reflète son potentiel sur le long terme” .
En définitive, les stratégies d'investissement doivent s'adapter à ce nouvel environnement. Quant à savoir si les marchés actions ont touché des points bas durables, les experts estiment qu'il faut d'abord attendre les résultats semestriels des entreprises et l'adoption d'un autre discours de la part des émetteurs, laissant entendre que la crise est derrière. A ce moment là, les points bas seront validés.
Youssef Seddik.