Du 26 juin au 5 juillet, l'Etat proposera au personnel de Maroc Telecom, aux investisseurs particuliers, aux entreprises et aux gestionnaires d'actifs marocains et étrangers la possibilité d'acheter un total de 17,5 millions d'actions Maroc Telecom à travers une offre publique de vente (OPV) en Bourse. Ceci rapportera à l'Etat 2,18 milliards de dirhams, auxquels s'ajoutent 6,7 milliards de dirhams qui seront levés dès ce lundi 17 juin auprès d'investisseurs institutionnels locaux, soit un peu moins de 9 Mds de dirhams pour 8% du capital de Maroc Telecom. Si l'objectif affiché est de financer le déficit publique, les détails techniques de l'offre montrent que l'Etat, à travers son ministre des Finances Mohamed Benchaâboun, souhaite aussi stimuler l'actionnariat populaire en attirant le plus grand nombre d'investisseurs. Certains détails dans le prospectus de l'opération, visé par l'AMMC samedi, permettent de déceler les signes avant-coureurs d'une future grande opération populaire.
Un syndicat large
Premièrement, le réseau placeur, chargés de diffuser et de placer les titres Maroc Telecom auprès du public est large. Il est composé de quasiment toutes les banques et sociétés de Bourse, soit 26 organismes. C'est généralement le cas lorsque l'initiateur de l'opération est l'Etat et cela permet d'atteindre le plus grand nombre de souscripteurs. Les opérations populaires ont toutes ce point en commun.
Deuxièmement, l'Etat et ses banques conseils ont fait le choix d'offrir le maximum de titres aux personnes physiques et aux entreprises, au détriment des OPCVM et des investisseurs étrangers. 5.8 millions d'actions leur seront proposées, sans compter les 2,9 millions de titres réservés au personnel.
En plus, le plafond des souscriptions est généreux pour les particuliers et les entreprises. Il est fixé à 10% de l'offre global et permet à un investisseur de demander jusqu'à 220 millions de dirhams d'actions. Si certaines personnes physiques peuvent se le permettre, cela sera surtout utile aux personnes morales. Les chefs d'entreprises pourront souscrire à titre personnel et au nom de leur entreprise.
Du collatéral pour couvrir la souscription
Le département de Benchâboun et ses conseils ont visiblement pensé à tout. Pour éviter à nos chère personnes physiques et morales de vendre des actifs financiers (parts d'OPCVM, actions cotées, etc...) pour souscrire, il leur sera permis de couvrir leurs souscriptions par du collatéral. En d'autres termes, ceux qui détiennent des actifs financiers peuvent les apporter en garantie s'ils ne disposent pas de liquidités. Les parts d'OPCVM monétaires et les obligations d'Etat sont acceptées à 100% de leur valeur au moment de la souscription alors que les autres parts d'OPCVM, les dépôts à terme et les actions cotées sont pris en collatéral à hauteur de 80% de leur valeur. Cette couverture doit rester bloquée jusqu’à l’allocation des titres. Cela évite par la même occasion une dégringolade excessive des actions cotées durant la semaine qui nous sépare du début des souscriptions où les investisseurs sont habituellement intéressés par des arbitrages.
Un bon track record
En plus des facilités manifestes offertes à l'actionnariat populaire, l'Etat lui offre, ainsi qu'au personnel de Maroc Telecom, une décote additionnelle par rapport aux investisseurs institutionnels. Ceci sans oublier que les privatisations ont bonne réputation ayant toujours créé de la valeur aux petits porteurs, particulièrement lorsqu'il s'agit de Maroc Telecom, l'une des plus belles histoires de la Bourse de Casablanca. Une entreprise résiliante qui a toujours su s'adapter aux saturations du marché et a toujours offert de bonnes opportunités aux investisseurs de long terme.
Avec son statut de valeur liquide et de rendement, elle constitue un réservoir à dividendes pour les gros portefeuilles. A 125,3 DH, prix proposé aux petits épargnants, son rendement théorique tourne autour de 5%. De plus, la société bénéficie d'un environnement sectoriel favorable et en grande mutation. Les tarifs planchers pour les segments importants (Voix et Data) instaurés en 2018 ont permis de stabiliser les prix après plusieurs années d’importantes baisses. Le groupe dispose d'une part de marché de 43% sur le mobile à fin mars 2019 et ses filiales africaines sont prometteuses. L'opérateur leur promet d'ailleurs des investissements réseaux conséquents pendant les deux prochaines années.
Si Maroc Telecom ne peut pas dépasser pour cette OPV son propre record de nombre de souscripteurs enregistré lors de son introduction en Bourse, avec pas mois de 130.000 investisseurs (les enjeux et les montants ne sont pas les mêmes), les records de Taqa Morocco (ex-Jlec) avec plus de 30.000 souscripteurs et Marsa Maroc avec plus de 18.000 demandeurs, sont en jeu avec cette OPV.
A.H