Le nouveau ratio de liquidité à court terme (LCR), issu des recommandations du Comité de Bâle III, est entré en vigueur pour les banques marocaines depuis le 1er juillet. Ce ratio est plus exigeant en matière de gestion et de classification des actifs liquides. Au Maroc, l’impact de ce ratio sur l’activité bancaire devrait être minime. La Banque populaire est déjà à un niveau de LCR supérieur à 100%.
En matière d’implémentation des normes bâloises, Bank Al-Maghrib a toujours fait figure de bon élève. Toujours prompte à mettre en œuvre les règles prudentielles édictées par la Banque des règlements internationaux (BRI), la Banque centrale a déjà transposé, l’an dernier, les règles liées au renforcement des fonds propres (voir financesnews.press.ma). Cette fois-ci, c’est le nouveau ratio de liquidité, issu des normes Bâle III, qui est entré en vigueur depuis le 1er juillet 2015. Ce nouveau ratio, appelé LCR pour Liquidity coverage ratio, soit ratio de liquidité à court terme, remplace le coefficient de liquidité, désormais caduque.
Un ratio plus contraignant
L’intérêt d’une telle mesure est de rendre le secteur bancaire plus résilient et, en particulier, à faire face aux chocs de liquidité à court terme. En effet, la crise financière de 2008 a montré que les exigences en fonds propres ne sont pas suffisantes pour remédier aux problèmes de cash à court terme. «Pendant la crise, de nombreuses banques, quoique dotées d’un niveau de fonds propres adéquat, se sont heurtées à des difficultés parce qu’elles n’ont pas géré leur liquidité de façon prudente», explique la BRI dans un document intitulé «Ratio de liquidité à court terme et outils de suivi du risque de liquidité». Concrètement, pour faire face à d’éventuelles tensions sur les liquidités, les banques sont tenues de disposer de suffisamment d’actifs liquides de grande qualité pour faire face à des sorties de trésorerie pendant 30 jours, dans un scénario de tensions aiguës à court terme. Et par actifs de haute qualité, on entend des actifs facilement convertibles en liquidité, à l’image des titres souverains ou de la dette privée très bien notée (A+ à BBB-). Ces actifs doivent également être facilement valorisable, faiblement volatile, et peuvent être considérés comme une valeur refuge.
«Le nouveau ratio de liquidité réglementaire, le LCR, est un ratio plus élaboré, issu des normes de Bâle III. En effet, alors que l’ancien ratio est davantage basé sur des données comptables, l’élaboration du LCR nécessite des données de gestion détaillées (classifications par nature de contrepartie, critères de stabilité des dépôts, etc.), et intègre des scénarios complexes de sorties de trésorerie», nous explique Hassan El Basri, Directeur général en charge des Risques Groupe à la Banque centrale populaire.
L’intégration d’un tel ratio est donc un exercice exigeant pour les banques. Elle induit une réorganisation de la gouvernance pour la gestion du risque de liquidité. Par ailleurs, en incitant les banques à acquérir des actifs plus liquides et, par conséquent, moins rentables, la rentabilité de l’établissement peut s’en retrouver affectée. Une étude du cabinet international Deloitte sur la gestion du risque de liquidité affirme que «les banques considèrent que le ratio LCR aura un impact globalement négatif sur la profitabilité et le développement potentiel de l’ensemble de leurs activités. Les métiers les plus affectés sont ceux étant structurellement déficitaires en liquidité, tels que le financement des entreprises, y compris les financements spécialisés (leasing, factoring et financements de projets), ainsi que le crédit à la consommation».
La BP déjà à 100%
Au Maroc, le choix a été fait pour une implémentation progressive du LCR, depuis le 1er juillet 2015, pour ne pas perturber le processus de financement de l’économie. Ainsi, Le LCR doit être supérieur à 60% pour la première année. Le ratio sera augmenté de 10%, chaque année, pour atteindre l’objectif des 100% en 2019.
L’impact de l’implémentation du ratio de liquidité court terme devrait être moins problématique pour les banques marocaines, notamment les grandes banques, dans la mesure où celles-ci sont des banques de détail dont la majorité des ressources est constituée des dépôts. L’enquête de Deloitte corrobore cette analyse : «l’impact du ratio LCR est perçu comme modéré pour les activités de banque de détail».
Certaines banques marocaines, à l’image de la Banque Populaire, sont mêmes déjà aux normes, comme le souligne H. El Basri : «dès les premières discussions sur ce projet et les études d’impact menées par Bank Al-Maghrib, nous avons procédé à des simulations sur ce nouveau ratio qui ont révélé une composition de nos actifs qui devrait faciliter le respect de ce ratio. C’est ce qui s’est confirmé par la suite, puisque la BCP affiche, aujourd’hui, un LCR qui dépasse les 100%, alors que la réglementation ne prévoit ce niveau qu’en 2019».
Les ajustements seront donc minimes pour le groupe bancaire marocain : «du fait que la Banque est déjà en conformité avec le nouveau ratio de liquidité, la mise en œuvre de celui-ci ne nécessitera pas de mesures ou d’actions spécifiques sur la qualité et la nature de nos actifs. La Banque dispose, en effet, d’un matelas confortable d’actifs liquides, principalement les bons du Trésor, qui couvrent largement les sorties de trésorerie. Nous envisageons, donc, de maintenir cette réserve de liquidité et même de la renforcer tout en actionnant les autres leviers susceptibles d’améliorer notre liquidité, telle la stabilité des dépôts», conclut El Basri.