Récemment mise en demeure par des créanciers pour non-respect de ses engagements, la société a tout de même réglé une échéance liée à une dette récente, émise en 2024. En hiérarchisant ainsi ses créanciers, elle semble vouloir gagner du temps et avancer rapidement sur le méga-marché des 10.300 logements remporté à Casablanca, qui lui aurait déjà permis d'obtenir des avances de trésorerie considérables.
La société immobilière Résidences Dar Saada (RDS) marche sur des œufs — du moins avec ses créanciers. Rattrapée par ses engagements passés, l’entreprise a été mise en demeure fin mai pour non-respect des termes d’une dette obligataire qu’elle avait pourtant reprofilée l’année dernière. En parallèle, elle a honoré une autre obligation obligataire, émise durant l'été 2024, visant à restructurer des titres de créance détenus par la CNSS en les transformant en titres de long terme. Cette différence de traitement entre créanciers montre que le promoteur choisit délibérément ses priorités.
Le paiement intégral — principal et intérêts — de l’obligation vis-à-vis de la CNSS démontre que la société conserve une certaine capacité financière. Mais elle semble avoir procédé à un arbitrage qui consiste à préserver ses relations avec des créanciers clés tout en accélérant son engagement opérationnel dans le chantier de relogement remporté début 2024, portant sur 10.300 logements à Casablanca.
Un minimum de 183 MDH d'avances selon les termes du contrat
Dans sa communication financière à fin mars, le management a indiqué que 6.100 appartements sont déjà en cours de production dans le cadre de ce programme. Cette mise en chantier ouvre la voie, de manière contractuelle, à des avances de trésorerie de la part de l’État, comme stipulé dans la convention signée à cet effet. Il s’agit de 30.000 dirhams par appartement dès le démarrage, soit un minimum de 183 millions de dirhams déjà encaissés par RDS.
Ce montant peut potentiellement être doublé si la société atteint 50 % d’avancement sur le projet, avec des décaissements ultérieurs allant jusqu’à 60 % à la livraison. Le reste est réglé par les acquéreurs au moment de la signature du compromis de vente devant notaire.
Des clichés pris sur le terrain montrent que la société a effectivement bien avancé sur le projet. Toutefois, il ne nous a pas été possible de confirmer si le seuil de 50 % a été validé par la commission technique de valorisation.
Une prise de risque assumée
En se concentrant sur ce projet, RDS semble avoir délibérément différé le règlement de certaines créances, quitte à faire face à des procédures judiciaires en cours. Ce comportement, bien que risqué, peut s’avérer payant si les flux générés par le projet de relogement permettent un assainissement rapide de la situation financière. À court terme, cela pourrait aussi redonner de la visibilité à une entreprise qui, ces dernières années, avait vu sa dynamique commerciale et la confiance du marché s’effriter.
Par ailleurs, le groupe cherche à reproduire cette stratégie à Marrakech. Il a indiqué, en avril 2025, être intéressé par l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) lancé pour le relogement des ménages de la ville ocre, un projet portant sur plus de 30.000 logements. Si RDS est retenue, cela devrait améliorer considérablement sa situation de trésorerie.
Selon les estimations du management, l'AMI de Casablanca devrait rapporter à lui seul 2,6 milliards de dirhams.