Alors que l’inflation reste maîtrisée et converge vers ses niveaux historiques, la Banque centrale a réduit son taux directeur de 25 points de base mardi dernier, marquant ainsi sa deuxième baisse consécutive et la troisième depuis juin 2024. Pour les analystes de CFG Bank, cela devrait libérer un potentiel important pour la Bourse. Explications.
Si l'on s'accorde à dire que l'impact de la baisse du taux directeur est positif pour le marché boursier, chiffrer cet impact n'est pas toujours évident. Les analystes de CFG Bank se sont penchés sur la question pour donner une estimation basée sur des calculs précis en utilisant les bénéfices estimés en 2025, le taux sans risque et les notions de PE théorique et PE observé.
Selon les prévisions de la banque, les bénéfices agrégés des entreprises, ajustés des éléments exceptionnels, devraient s’établir à 45 893 millions de dirhams en 2025E, en hausse de 11,6 % par rapport à 2024E. Le ratio cours/bénéfices (P/E), déduit de ces estimations de croissance des bénéfices et des niveaux de valorisation actuels, s’élève à 19,4x les bénéfices estimés de 2025.
Par ailleurs, la valeur théorique ou « juste » du P/E du marché dépend du rendement des bénéfices et du taux sans risque. L’écart entre le P/E théorique et le P/E observé détermine ainsi l’évolution du marché.
Pour estimer le P/E théorique induit par le taux sans risque et déduire l’évolution potentielle de la Bourse de Casablanca, les analystes ont commencé par calculer l’écart entre le taux sans risque (obligations souveraines à 10 ans) et l’inverse du P/E (c’est-à-dire le rendement des bénéfices) sur la période 2014-2024. "D’après nos calculs, l’écart moyen sur les 10 dernières années est de 1,88 %. Ces écarts sont relativement stables dans la durée, avec une faible volatilité d’une année à l’autre, et donc proches de leur moyenne décennale. Ajusté des extrêmes enregistrés en 2014 et 2022 (respectivement 1,3 % et 2,5 %), l’écart moyen ajusté reste à 1,88 %, soit l’équivalent de la moyenne brute".
Partant de là, les analystes ont appliqué cet écart moyen (1,88 %) au taux sans risque actuel (3,07 %) pour estimer le rendement des bénéfices, puis, par déduction, le P/E théorique. Au final, le rendement des bénéfices s’élève à 4,95 %, ce qui induit un P/E théorique de 20,2x les bénéfices estimés de 2025.
"Sur la base de nos prévisions, le marché se négocie actuellement à 19,4x les bénéfices de 2025. Ainsi, si les niveaux de valorisation devaient s’ajuster et converger vers leur juste valeur, le P/E du marché grimperait vers 20,2x et le marché progresserait de 4 %", écrivent-il dans une note diffusée ce 24 mars. Et de poursuivre : "À notre avis, le taux sans risque continuera probablement sa trajectoire baissière pour atteindre 2,95 %. En effet, le Maroc envisage l’émission d’un emprunt souverain libellé en devises. Si ce projet se concrétise, il allégerait davantage la pression sur le marché obligataire local, réduisant ainsi les rendements des bons du Trésor et favorisant l’élargissement des niveaux de valorisation. Dans cette configuration, le potentiel de hausse du marché est estimé à environ +7 %".
Toute nouvelle détente des rendements souverains dilaterait le P/E théorique et, de facto, renforcerait davantage le potentiel de hausse du marché.
"En effet, si les rendements des bons du Trésor poursuivaient leur baisse – scénario que nous jugeons très probable – nous anticipons une contraction du rendement des bénéfices, une hausse du P/E théorique et, par conséquent, une augmentation mécanique des niveaux de valorisation".
Un potentiel de hausse additionnel pour le MASI en cas de nouvelle baisse du taux directeur
"Par ailleurs, selon nos calculs, l’écart moyen entre le taux directeur et le taux sans risque est de 85 points de base. Ainsi, si la Banque centrale devait réduire une nouvelle fois son taux directeur de 25 points de base, à 2 %, dans les mois à venir, alors le taux sans risque pourrait probablement s’orienter vers 2,85 %, entraînant une appréciation du marché d’environ 9 % par rapport aux niveaux de valorisation actuels".