Par Farid RAOUF – Senior Manager Risk Management LENDYS Africa.
Les principaux impacts que les banques devront considérer sont notamment les suivants :
1.Le recalibrage des paramètres de calcul du « Forward-looking », en intégrant de nouvelles données macro-économiques pour les prévisions retenues (ex : taux de chômage post-crise COVID-19, évolution des cours de matières premières, etc.)
Chaque banque devra élaborer ses propres hypothèses et établir un niveau de provision en conformité avec IFRS9. En Europe, la BCE s’attend à ce que les banques prennent en compte les recommandations présentées dans la lettre du 1er Avril qui leur a été adressée. Celles-ci ont été établies compte-tenu du niveau élevé d’incertitude et du manque d’informations prospectives en lien avec les impacts du Covid-19 afin qu’ils soient considérés comme raisonnables et justifiables au sens d’IFRS 9. A noter par ailleurs, la BCE a également recommandé de pondérer plus fortement le scénario central de long terme s’appuyant sur des données historiques et de prendre en compte le bénéfice des politiques publiques de soutien. De façon analogue, ces recommandations peuvent être appliquées sur les modèles Africains pour lesquels notamment, une indexation sur l’évolution de la tendance des cours de matières premières est révélatrice du caractère prospectif des données macro-économiques.
2. L’intégration d’une marge de prudence/facteur d’aggravation des probabilités de défaut actuelles tenant compte des répercutions de cette crise sur la capacité de remboursement future des débiteurs.
En lien notamment avec les prérequis de l’EBA concernant une marge de prudence de type B attendue pour une mise en application début 2021 en Europe, l’enjeu sera de déterminer si la mise en place de moratoires constitue une modification jugée substantielle ou non ayant potentiellement un effet en résultat. Par ailleurs, il est également attendu pour les paramètres de risques, une éventuelle aggravation des taux de défauts au regard de la situation à venir concernant la dégradation de la qualité de certains débiteurs fortement impactés par la crise (notamment TPE et SME).
3.Revue des taux d’actualisation utilisés actuellement en intégrant les effets de cette crise sur l’augmentation notamment du risque de contrepartie.
Au regard de la volatilité actuelle des taux et des mesures de soutien des banques centrales sur le volet liquidité, un regard très attentif devra être porté aux impacts qui pourraient se répercuter sur le bilan, le cash, le compte de résultats et les capitaux propres. Pour rappel, la norme IAS19 stipule que le taux d’actualisation doit être « déterminé par référence aux taux de rendement, à la fin de la période de présentation de l’information financière, du marché des obligations de sociétés de haute qualité. Dans les pays où il n’existe pas de marché large pour ce type d’obligations, il faut se référer aux taux de rendement (à la fin de la période de présentation de l’information financière) du marché des obligations d’État… ». Au vu de la volatilité à venir des taux, une évolution des taux d’actualisation utilisés est également à envisager.
4.La revue des modèles de notation interne ainsi que les paramètres utilisés pour le calcul des probabilités de défaut actuelles.
Il est évoqué plus haut, l’impact à considérer concernant une marge de prudence (à savoir MoC B) sur la probabilité de défaut. Ici, il est question d’une revue des modèles de notation ainsi que des modèles de probabilités de défaut (PD) s’appuyant sur un historique TTC (Through-the-Cycle) qui doit notamment considérer une représentativité de la variabilité des taux de défauts observés. De ce fait, l’historique utilisé devra considérer les récentes observations historiques notamment dans le cadre des back-testing pour apprécier la robustesse des modèles de notation et de PD. Si ces derniers s’avèrent être en deçà des critères de robustesse, une revue des modèles sera ainsi à considérer.
5.Le recalibrage des paramètres de calcul de la LGD tenant compte des contraintes de recouvrement futurs.
En lien notamment avec les éventuelles dégradations à venir des taux de défauts, il faudra également s’attendre à des contraintes liées aux recouvrements futurs. A ce titre, les modèles LGD reposant notamment sur des projections des flux de recouvrements futurs devront également intégrer la baisse éventuelle des recouvrements liés aux impacts de cette crise sanitaire sans précédent.
En fonction de l’avancement de cette crise, de nouvelles réflexions verront le jour et les fonctions risques devront ainsi mener plusieurs études d’impacts sectorielles permettant d’affiner correctement leurs modèles. En parallèle, espérons que les différents mécanismes de soutien économique permettent rapidement un relancement de l’économie.