Le parquet national financier a requis jeudi une amende de 3,7 milliards d'euros contre le géant bancaire suisse UBS AG, accusé d'avoir "en parfaite conscience" illégalement démarché de riches clients français et dissimulé des milliards d'avoirs non déclarés.
"La fraude à l'impôt, ce n'est rien d'autre qu'un vol commis au préjudice de la collectivité", "une attaque inacceptable contre le pacte républicain" et "les banques méritent d'être poursuivies et sanctionnées à hauteur du préjudice" subi par la société, a asséné le procureur Eric Russo, au terme du premier procès tenu en France pour une fraude d'une telle ampleur.
Pour l'accusation, "UBS AG et ses dirigeants avaient parfaitement conscience d'enfreindre la loi française" en venant démarcher des résidents fiscaux français lors d'"events", comme les réceptions, tournois sportifs ou parties de chasses.
"Elle est le numéro 1 de la banque privée, ce qui implique des devoirs. Votre décision doit être significative et la sanction doit être proportionnelle au montant des fonds dissimulés", a affirmé Serge Roques, deuxième représentant du ministère public.
Le PNF a justifié l'amende requise par un savant calcul tenant compte du montant des avoirs français dissimulés en Suisse - "entre 3,7 et 23 milliards d'euros selon les évaluations" - et des peines déjà infligées dans des affaires similaires.
La réaction de la banque n'a pas tardé: dans un communiqué, elle a fustigé "le calcul irrationnel" des amendes requises, déplorant une "approche simpliste" sans "aucune preuve des délits incriminés".
Au terme de ces calculs, le PNF estime à plus de 9 milliards la peine encourue. Le chiffre de 3,7 milliards finalement retenu contre la maison mère, correspond aux sommes régularisées par les clients français d'UBS à la cellule de "dégrisement" de Bercy.
Contre la filiale française, UBS France, accusée de complicité de démarchage illicite et de blanchiment aggravé, le PNF a requis 15 millions d'euros d'amende.
Le PNF a enfin demandé des peines de prison toutes assorties du sursis (de six mois à deux ans) et de très lourdes amendes à l'encontre de six hauts responsables de la banque en France et en Suisse.
La plus lourde peine requise, deux ans de sursis et 500.000 euros, a été demandée contre Raoul Weil, l'ex-numéro 3 d'UBS AG. Douze mois de sursis et 300.000 euros ont été requis contre Patrick de Fayet, l'ex-numéro 2 d'UBS France et promoteur des "carnets du lait", simple outil d'évaluation des performances des banquiers selon la défense, comptabilité occulte destinée à masquer les mouvements transfrontaliers non déclarés entre les deux pays pour l'accusation.
Des peines de 6 à 18 mois de sursis et des amendes de 50.000 à 400.000 euros ont été requises à l'encontre des autres anciens cadres d'UBS, Philippe Wick, ex-patron du département France International, son ancien bras droit Olivier Baudry, Dieter Kiefer, qui fut responsable de la division Europe de l'Ouest à UBS AG, et enfin Hervé d'Halluin, ancien chef du bureau d'UBS à Lille.
AFP.