BANGALORE (Reuters) - L’économie de la zone euro est déjà entrée dans la pire récession de son histoire, montre mercredi une enquête de Reuters auprès d’économistes, et la situation pourrait encore se dégrader en raison du maintien des mesures de confinement en vigueur dans la plupart des pays de la région.
Cette situation exceptionnelle pourrait conduire la Banque centrale européenne (BCE), qui a déjà promis d’acheter pour plus de 1.000 milliards d’euros d’actifs sur les marchés d’ici la fin de l’année, à aller encore plus loin.
L’enquête, réalisée entre le 14 et le 22 avril, prédit une contraction de 3,1% du produit intérieur brut (PIB) de la zone euro au premier trimestre et de 9,6% au deuxième, du jamais vu. Ces chiffres étaient de 3,3% et 9,3% respectivement dans une enquête similaire publiée le 3 avril.
La région renouerait avec la croissance à partir du troisième trimestre avec un rebond de 5,2% du PIB sur juillet-septembre et de 2,9% sur octobre-décembre (contre 6,0% et 2,0% dans l’enquête précédente).
Mais 95% des économistes interrogés reconnaissent que les risques entourant leurs prévisions pour le second semestre sont surtout orientés à la baisse.
“Plus la récession sera profonde, plus elle durera, plus il y aura un risque de voir le potentiel d’offre de l’économie compromis car la probabilité que les salariés soient au chômage et que les compagnies déposent le bilan sera élevée”, explique Spyros Andreopoulos, économiste senior pour l’Europe cher BNP Paribas.
“La réponse politique a jusqu’à présent été moins décisive. C’est pourquoi nous ne nous attendons pas à retrouver rapidement les prévisions de croissance antérieures.”
Sur l’ensemble de cette année, le PIB des 19 devrait se contracter de 5,4%, ce qui serait sa pire performance depuis la création de l’euro en 1999. Le Fonds monétaire international (FMI), dans ses prévisions publiées la semaine dernière, prévoyait une chute de 7,5%.
La médiane des prévisions d’évolution du PIB des économistes dans le pire de leurs scénarios atteint -12% mais les estimations s’échelonnent entre -5% et -21%, ce qui souligne le degré élevé d’incertitude actuel.
“On a du mal à croire que la situation va revenir à la normale après le confinement. Il y aura des changements dans l’offre comme dans la demande car les comportements vont être modifiés pendant un bon moment”, dit Philippe Gudin, chef économiste Europe de Barclays.
“Les gens vont-ils renouer avec leurs vieilles habitudes, vont-ils rapidement recommencer à voyager ? Il y a beaucoup d’incertitude mais il est certain que le risque entourant notre scénario est orienté à la baisse.”
Environ 70% de la cinquantaine d’économistes qui ont répondu à une question sur la configuration de la reprise ont dit s’attendre à une reprise en U (c’est-à-dire avec une période de stagnation entre la contraction et le redémarrage) et 20% environ seulement à une reprise en V (avec un redémarrage rapide après la chute).
Parmi ceux qui ont répondu à une question sur la stratégie de la BCE, 30 sur 38 ont estimé qu’elle devrait prendre des mesures supplémentaires d’assouplissement, la plupart précisant tabler sur une nouvelle augmentation des achats d’actifs et certains précisant qu’elle pourrait imiter la Banque du Japon en commençant à acheter des fonds indiciels cotés (ETF).
Le bilan de la BCE, qui avoisine déjà 5.300 milliards d’euros, pourrait ainsi atteindre 6.200 milliards à la fin de l’année et 6.700 milliards fin 2021.