La Chine réduit sensiblement ses importations d’or depuis mai, ont dit à Reuters des sources directement au fait du dossier, décision dont le but pourrait être de freiner les sorties de dollars et de stimuler le yuan.
Les importations ont diminué de 300 à 500 tonnes par rapport à l’an dernier, ce qui représente un montant de 15 à 25 milliards de dollars aux cours actuels, ont ajouté les sources.
La Chine est le deuxième importateur mondial d’or, ayant absorbé autour de 1.500 tonnes du métal précieux l’an passé, à une valeur d’une soixantaine de milliards de dollars, selon ses statistiques douanières, l’équivalent du tiers de l’offre mondiale.
Les réserves d’or de la Chine ont quintuplé durant les deux dernières décennies pour atteindre près de 2.000 tonnes, selon des données officielles.
Les statistiques douanières montrent que la Chine a importé 575 tonnes d’or au premier semestre contre 883 tonnes au premier semestre 2018.
En mai, 71 tonnes ont été importées contre 157 tonnes en mai 2018 et en juin, dernier mois de données disponibles, le recul est encore plus net: 57 tonnes contre 199 tonnes en juin 2018.
Les importations chinoises, en provenance de Suisse, d’Australie, d’Afrique du Sud entre autres, sont payées en dollar et passent par l’intermédiaire d’un groupe de banques locales et internationales auxquelles la Banque populaire de Chine (BPC) assigne des quotas mensuels.
Mais cela fait plusieurs mois que ces quotas ont été sensiblement diminués voire n’ont pas été assignés, ont dit sept sources du secteur de Londres, Hong Kong, Singapour et de Chine.
“Il n’y a pratiquement plus de quotas d’importation émis par la Chine actuellement”, a dit l’une d’elles. Les banques n’ont importé “quasiment rien” en juin et en juillet, ont noté les sources.
La BPC n’a pas répondu à une sollicitation de commentaires écrite.
Les importations ne sont pas purement et simplement arrêtées parce certaines banques reçoivent peut-être encore des quotas et d’autres canaux d’importation restent ouvert, pour l’affinage du métal par exemple, ont expliqué quatre des sources.
Il est probable que Pékin veut par ce biais restreindre les sorties de capitaux alors même que le yuan a perdu de sa valeur.
Ce n’est pas la première fois que la Chine prend des mesures pour maîtriser les sorties de capitaux lorsque la monnaie nationale faiblit et elle a déjà réduit les quotas d’importation d’or par le passé, la dernière fois en 2016.
Mais les restrictions sont cette fois-ci d’une ampleur “sans précédent”, a dit une source industrielle en Asie.
“Tout cela a à voir avec la manière dont la banque centrale gère la monnaie”, a observé l’une des sources.
Le yuan a perdu plus de 10% contre le dollar depuis le début 2018 et la BPC l’a laissé filer ce mois-ci en deçà de l’important seuil de sept par dollar, et ce pour la première fois depuis plus de dix ans.
Les sorties de capitaux hors de Chine ne sont pas retracées dans des chiffres officiels dédiés mais on les déduit souvent à partir de la composante de la balance des paiements appelée “erreurs et omissions”, qui donnait des sorties de 88 milliards de dollars au premier trimestre, un record.
Dotées de réserves de change représentant l’équivalent de 3.100 milliards de dollars, les plus importantes au monde, la Chine a les moyens de défendre sa monnaie.
Mais restreindre les importations d’or est un moyen simple de réduire les sorties de capitaux sans affecter la vie de tous les jours de la population, expliquent des banquiers spécialisés.
Pour l’heure, les effets sur le marché de l’or sont timides.
Le ralentissement de la croissance économique mondiale pousse beaucoup d’investisseurs institutionnels, surtout en Europe et en Amérique du Nord, vers l’or, considéré habituellement comme un actif sûr, tandis que les banques centrales n’ont jamais autant acheté de métal jaune depuis un demi-siècle.
Toutefois, le coût de l’or pourrait augmenter en Chine si le bond de l’offre de métal recyclé venait à perdre de l’élan avant que les restrictions à l’importation soient levées, et l’offre pourrait rapidement dépasser la demande en dehors de la Chine si les institutionnels n’achetaient plus autant que maintenant.
Reuters.