Elon Musk, après plusieurs mois d'une saga mouvementée, a effectué un énième revirement en proposant à nouveau de racheter Twitter mardi. Les deux parties négocient désormais les prochaines étapes, mais le mystère demeure sur de nombreux points.
Elon Musk, qui avait proposé au printemps d'acheter la plateforme à 54,20 dollars l'action avant d'y renoncer en juillet, a envoyé à Twitter une lettre indiquant qu'il était de nouveau prêt à racheter la plateforme au prix convenu initialement. A deux conditions: que la procédure en cours engagée par le réseau social pour que l'entrepreneur tienne parole soit suspendue, et qu'il reçoive les financements nécessaires.
Twitter a pris acte et indiqué avoir toujours "l'intention" de conclure la transaction.
Selon le New York Times, la juge du tribunal des affaires supervisant la procédure a convoqué les parties pour une réunion confidentielle mardi et leur a demandé de s'arranger entre eux avant de revenir devant elle.
S'ils parviennent à un accord, cela annulerait le procès, censé débuter le 17 octobre dans l'Etat du Delaware.
Déjà échaudé par les attaques et volte-face d'Elon Musk, Twitter va sans doute vouloir de solides assurances avant de renoncer à la procédure, comme le dépôt d'une énorme somme d'argent en garantie, avance Adam Badawi, professeur en droit des affaires à l'université de Berkeley.
Il est aussi évoqué la possibilité que le groupe demande à ce que la finalisation de l'accord soit supervisée par un juge.
Les avocats de Twitter n'avaient pas dans l'immédiat donné suite à des sollicitations de l'AFP.
Elon Musk est un habitué des polémiques, des promesses non tenues, et des procès. Mais même pour le fantasque multi-milliardaire, les sommes en jeu restent conséquentes.
Déterminer les motivations de sa dernière décision reste pour l'instant de l'ordre de la spéculation.
Plusieurs juristes estiment qu'il a simplement réalisé qu'il n'allait sans doute pas gagner le procès, car il ne parvenait pas à démontrer suffisamment son principal argument pour justifier l'annulation de l'accord: la présence de comptes automatisés sur Twitter bien plus importante que reconnu par la plateforme.
Pour Carl Tobias, professeur de droit à l'université de Richmond, il est aussi possible qu'Elon Musk ait pu être gêné par la diffusion, dans le cadre de la procédure, de messages échangés avec d'autres personnalités du monde des affaires et ait souhaité éviter la publication d'autres messages.
Le fait qu'il n'ait pas procédé, avant son offre initiale, à une vérification préalable de l'état de l'entreprise, comme c'est le cas habituellement dans ce genre d'accord, revient aussi le hanter, avance M. Tobias.
"Je crois que, des deux côtés, la situation est devenue embarrassante, révélatrice et pas très constructive", estime-t-il.
L'action de Twitter a bondi de 22% mardi, après la révélation de la nouvelle offre d'Elon Musk.
Mais l'entreprise n'est pas au meilleure de sa forme.
Elle souffre, comme d'autres géants de la tech, de la baisse des dépenses publicitaires sur fond de ralentissement économique, et son image a été écornée par les turbulences liés à l'incertitude autour du rachat potentiel par Elon Musk. Le groupe a ainsi vu son chiffre d'affaires reculer, de 1%, au deuxième trimestre, tandis que le moral des employés n'est pas au beau fixe.
De récentes accusations de son ex-chef de la sécurité licencié en janvier, Peiter Zatko, ont un peu plus ébranlé la réputation du réseau social. Celui qui se présente comme un lanceur d'alerte reproche à la direction de ne pas prendre suffisamment au sérieux de graves failles de sécurité.
"Il est assez ironique que, pour Musk, la partie la plus facile de cet accord consistait à acheter Twitter", avance Dan Ives, analyste pour le cabinet Wedbush Securities. "La partie la plus difficile sera de traiter les problèmes liés à la monétisation et à l'engagement des abonnés."
La probabilité qu'un accord soit conclu a ravivé de vives inquiétudes sur un possible regain d'abus et de désinformation sur la plateforme.
Elon Musk se présente comme un ardent défenseur de la liberté d'expression et a d'ores et déjà prévenu qu'il prévoyait de laisser les internautes s'exprimer comme ils l'entendent, tant qu'ils n'enfreignent pas la loi.
En mai, il s'était aussi dit prêt à lever la suspension définitive du compte de l'ex-président Donald Trump sur Twitter, décidée après l'attaque du Capitole en janvier 2021.
Avec AFP.