EMISSION DU 10/27 - par bourse news

Maroc : Des experts s’attendent à une explosion des défaillances des entreprises

Les pressions inflationnistes, le resserrement monétaire, la crise énergétique et les perturbations des chaînes d’approvisionnement mettent la trésorerie des entreprises en péril. Toutefois, de nombreux gouvernements ont décidé de déployer des politiques budgétaires fortes pour faire face à la situation actuelle. Ces mesures seront-elles suffisantes pour empêcher une forte hausse des défaillances d’entreprises à l’échelle mondiale et locale ? Allianz Trade, s’est penché sur la question dans sa dernière étude.

Selon Allianz Trade, les défaillances d’entreprises devraient rebondir à l’échelle mondiale en 2022 (+10%) et en 2023 (+19%). Deux rebonds significatifs, qui surviendront après deux années consécutives de recul, et qui devraient ramener les défaillances aux dessus de leurs niveaux pré-pandémie dès l’année prochaine (+2%).

 

L’Europe devrait être particulièrement affectée par la hausse des défaillances lors des deux prochaines années : Allianz Trade prévoit une forte croissance des défaillances d’entreprises en France (+46% en 2022 ; +29% en 2023), au Royaume-Uni (+51% ; +10%), en Allemagne (+5% ; +17%) et en Italie (-6% ; +36%). La région devrait, dans son ensemble, dépasser ses niveaux de défaillances d’entreprises pré-pandémie dès la fin de l’année 2022 (+5%). En Asie, la Chine devrait enregistrer une hausse des défaillances de +15% en 2023, principalement du fait du faible rythme de croissance économique et de l’impact limité de l’assouplissement monétaire et budgétaire. Aux Etats-Unis, Allianz Trade anticipe une hausse de +38% des défaillances en 2023, conséquence directe du durcissement des conditions financières et monétaires.

 

3 chocs de rentabilité pèsent fortement sur la trésorerie des entreprises

Comment expliquer cette hausse généralisée des défaillances d’entreprises? Allianz Trade identifie 3 chocs majeurs qui pourraient avoir un impact conséquent sur la rentabilité des entreprises.

 

La facture énergétique reste le choc de rentabilité le plus important, plus particulièrement dans les pays européens mais également au Maroc. Aux niveaux actuels, dans un contexte de recul du pricing-power et de ralentissement de la demande, les prix de l’énergie feraient disparaître les profits de la plupart des entreprises non-financières. Si les entreprises étaient en mesure de répercuter ne serait-ce qu’un quart de la hausse du prix de l’énergie sur leurs prix de ventes, elles pourraient supporter une hausse du coût de l’énergie de +50% en Allemagne et de +40% en France. Si l’on regarde plus précisément le cas de la France, en excluant les microentreprises[2], Allianz Trade estime que la hausse du prix de l’énergie pourrait coûter -9 Mds EUR à plus de 7000 entreprises appartenant aux 4 secteurs les plus exposés à la situation actuelle, à savoir le papier, la métallurgie, les machines et équipements et l’industrie minière. En comparaison, en Allemagne, ce montant atteint -7 Mds EUR, et concerne 4000 entreprises, appartenant principalement aux secteurs du papier et de la métallurgie.

 

Par ailleurs, la hausse des taux d’intérêts devrait se poursuivre au premier semestre 2023, en parallèle de l’accélération des salaires. En Europe, ce choc devrait être équivalent au choc de rentabilité subi par les entreprises lors de la crise Covid-19, à savoir un impact de -4 points de marge. Comme attendu, les fortes réserves de liquidités des entreprises (toujours +43% au-dessus de leur niveau pré-pandémie aux Etats-Unis, +36% au Royaume-Uni et +32% en zone euro) ont permis aux entreprises de se protéger de la normalisation des politiques monétaires en 2022, mais le pire reste à venir.

 

« Nous estimons que les prochaines hausses de taux directeurs à venir aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en zone euro feront croître les taux d’intérêts pour les entreprises de +200 points de base d’ici mi-2023, ce qui affectera les marges à hauteur de -1,5 point aux Etats-Unis, -2,2 points au Royaume-Uni et -3 points en zone euro. L’Italie, la France et l’Espagne sont les pays les plus exposés. De plus, les salaires sont légèrement plus coûteux pour les secteurs industriels européens que pour les américains. Ainsi, une hausse des salaires 4 à 5% en 2023 pourrait amputer les marges des entreprises de -0,5 point à -1 point en moyenne. De manière générale, la hausse des taux et des salaires, dans un contexte de faible croissance économique met particulièrement en péril les secteurs de la construction, des transports, des télécoms, des machines et équipements, de la distribution, des équipements des ménages, de l’électronique, de l’automobile et du textile », ajoute Ana Boata, Directrice de la Recherche économique d’Allianz Trade. « De par son profond ancrage économique autour des pays de la zone euro, mais également de par les hausses enregistrée et escomptée du taux directeur par Bank Al Maghrib, l'impact sur les marges des entreprises marocaines devrait suivre une tendance similaire à celle anticipée pour les entreprises de la zone euro », estime pour sa part Hicham Bensaid Alaoui, Directeur Général d'Allianz Trade au Maroc.

Et le Maroc dans tout cela?

Au Maroc, le rebond des défaillances d'entreprises est l'un des plus spectaculaires parmi les pays concernés par cette étude.

L'analyse des évolutions pouvant être biaisée, ou du moins insuffisamment parfaite, lors des années précédentes (recul encore insuffisant pour réellement dégager une tendance durable, fermeture des tribunaux de commerce en 2020, entraînant un niveau artificiellement bas de défaillances d'entreprises, avec un phénomène de rattrapage observé par la suite, niveau particulièrement important du soutien étatique depuis 2020…), une comparaison entre 2023 et la période d'avant-Covid semble autrement plus pertinente. L'installation du 'new normal' révèle, à ce titre, une spectaculaire hausse de 44% des défaillances d'entreprises au Maroc…

 

Pour conclure, selon Allianz Trade, au Maroc, l'effet de la crise économique commencera à se faire percevoir avec davantage d'acuité en 2023, là où des aides publiques exceptionnelles et une grande stabilité des agrégats macro-économiques avaient permis de digérer davantage les chocs exogènes. L'impact additionnel du choc énergétique et de la pression inflationniste ont contribué à rendre la situation économique encore plus sensible, induisant ce niveau particulièrement important de défaillances d'entreprises.

 

 

Articles qui pourraient vous intéresser

Vendredi 20 Decembre 2024

Perspectives économiques: Les projections de Bank Al-Maghrib à l’horizon 2026

Mercredi 12 Juin 2024

La croissance mondiale se stabilise pour la première fois en trois ans

Lundi 29 Avril 2024

Maroc: La valeur ajoutée agricole s’est accrue de 6,2% en moyenne en 2023