Même en dehors des périodes de crise, le Conseil d'administration demeure un organe central pour la vie de l’entreprise. Toutefois, dans un contexte où les enjeux sont aussi élevés, cet organe se doit de suivre de plus près les décisions importantes prises par le management, tout en demeurant en contact régulier avec celui-ci.
Car la prise de décisions au sein d’une entreprise n’est jamais un processus simple. Encore plus dans de pareilles circonstances, où dirigeants et administrateurs doivent décider de questions aussi complexes qu’urgentes.
«Si en temps normal le rôle de l’administrateur est de veiller en particulier à la protection de ‘l’intérêt social’ de la société, ce rôle est accru en temps de crise. L’administrateur doit en effet être capable d’identifier les difficultés de la société et de prendre toutes les décisions relatives aux mesures à instaurer pour y remédier. Le devoir de loyauté et le devoir de diligence obligent à superviser la gestion de la société au mieux des intérêts de cette dernière», nous explique Rachid Belkahia, associé-gérant de Associés en gouvernance et vice-président de l’Institut marocain des administrateurs.
Pour Belkahia, les administrateurs devront suivre une série d’étapes pour apporter une réponse concrète dans de pareilles circonstances. Il s’agit notamment de revisiter la politique de communication (donner plus d’informations ou encore modifier l’information communiquée), interroger les plans de continuité d’activité de la société, veiller au respect des clauses contractuelles, examiner les nouveaux droits contractuels dont dispose la société, s’assurer de l’identification et de la gestion des nouveaux risques (chaîne d’approvisionnement, sécurité des collaborateurs...).
L’apport des administrateurs indépendants
Une sortie de crise, ça se prépare. Le management peut en effet bénéficier des conseils de ses administrateurs (indépendants) qui n'ont pas à éteindre le feu sur le terrain et qui ont du recul pour amener un éclairage différent dans la prise de décision.
«L’organe de gouvernance et le management doivent travailler de manière rapprochée, coordonnée et complémentaire avec plus d’interactions», appuie l’expert. Pour lui, le management se concentre sur la gestion du présent en priorisant les actions à mener et en veillant à assurer la continuité du business, l’organe de gouvernance devant se projeter davantage dans la gestion post-crise.
Dans le contexte post-crise, il n’est pas impossible que les Conseils aient besoin de profils nouveaux (stratégie, RSE, digital, risques...) pour enrichir leur tour de table afin de remplir au mieux leur responsabilité fiduciaire et accompagner le développement et la transformation de l’entreprise.
Pour Belkahia, le recours à des administrateurs indépendants pourrait renforcer la diversité (compétences, genre, nationalité...) au sein des Conseils et constituer un véritable levier de performance. D’ailleurs, plusieurs sociétés cotées à la Bourse de Casablanca ont annoncé avoir nommé des administrateurs indépendants dans leurs avis post-assemblée générale.
«La crise a également mis les organes de gouvernance à rude épreuve. Elle a permis en effet de valider la robustesse de la gouvernance de l’entreprise et d’interroger le rôle, les responsabilités ainsi que la composition des Conseils en termes de compétences et d’apports de valeur», conclut R. Belkahia.
Youssef Seddik.