Le Maroc devrait enregistrer en 2016 son pire taux de croissance depuis 5 ans. A 1,2%, il subit la dégringolade de la valeur ajoutée agricole et une croissance non agricole timide cantonnée à 2,6%. C'est ce qui ressort des dernières prévisions de la Banque centrale livrées à l'occasion du dernier Conseil monétaire de l'année. Mais à partir de 2017, la croissance devrait repartir et revenir à des niveaux plus normatifs supérieurs à 3,5%. Comment justifier ces prévisions et quelles conclusions en tirer ?
Si la Banque centrale a décidé de maintenir son taux directeur inchangé à 2,25%, c'est en raison de ses prévisions d'inflation inférieures à 2% (1,6% prévu pour 2016) qui reste identiques à l'inflation constatée en 2015. L'inflation sous-jacente est pour sa part encore plus faible et avoisinera les 0,8% cette année pour atteindre 1,5% en 2017. Pour rappel, l'inflation sous-jacente exclut les prix des produits volatils. Pour 2017, fidèle à son habitude, le gouverneur de Bank Al-Maghrib est resté vague sur ses intentions, estimant que le taux directeur évoluera au gré de la conjoncture. Mais ce Conseil, tenu mardi dernier, était également l'occasion pour BAM de livrer ses nouvelles prévisions de croissance pour l'année en cours et les deux prochaines. La campagne agricole très moyenne de 2016 a poussé l'Institut d'émission à revoir à la baisse de 0,6 point l'évolution anticipée de la valeur ajoutée agricole, ramenant sa prévision à -9,6% contre une évolution positive de 12,8% constatée en 2015. Quant au PIB non agricole, il devrait afficher un petit 2,6%, contre 3,5% pour 2015. Plusieurs raisons justifient ce scénario, à commencer par une progression plus rapide des importations par rapport aux exportations et surtout une consommation des ménages atone, pâtissant du ralentissement du marché du travail et de la baisse des revenus agricoles. Un autre phénomène explicatif est la baisse durable des dépenses budgétaires de fonctionnement.
Au final, la combinaison de ces phénomènes devrait provoquer une croissance nationale de 1,2% en 2016, contre 4,5% en 2015 et 2,6% en 2014.
Et si on regardait le verre à moitié plein ?
BAM voit certes une petite année pour l'économie nationale en 2016 mais les années 2017 et 2018 s'annoncent sous de meilleurs auspices. La Banque centrale prévoit respectivement 4,2% et 3,7% de croissance pour les deux prochaines années et ce, en se basant sur un camapagne agricole moyenne dans son scénario central. Autant dire que les prévisions sont sous-évaluées, tant l'année 2017 démarre sur les chapeaux de roues pour les agriculteurs. Dans le langage de la Banque centrale, une campagne agricole moyenne se traduit par une production céréalière autour de 70 millions de quintaux. Si la production dépasse ce niveau, Le PIB agricole devrait progresser encore plus.
Dans son scénario central, BAM prévoit une croissance agricole de 10,5% en 2017 et 3,5% en 2018. La croissance non agricole devrait se situer à 3,4% en 2017 et 3,7% en 2018, l'année 2017 profitant d'un effet de rattrapage par rapport à 2016. Les mêmes effets produisant les mêmes résultats, les revenus agricoles devront profiter à d'autres secteurs et donc tirer la consommation des ménages. En clair, l'économie devrait repartir en 2017 et retrouver son rythme de croisière en 2018.
Dans ses prévisions, la Banque centrale ne prend pas en compte les effets de l'adoption d'un régime de change flexible. Abdellattif Jouahri estime que cette décision sera réfléchie et mise en place en plusieurs étapes, de sorte à maîtriser les aspects et les impacts.