Les essais cliniques du vaccin développé par le chinois Sinopharm et menés au Maroc ainsi que dans quelques autres pays volontaires se passent bien. En attendant que son développement franchisse les étapes finales et que l'OMS donne son feu vert, les investisseurs peuvent se demander comment réagir pour profiter de cette nouvelle majeure en Bourse, alors que le gouvernement marocain vient de confirmer la disponibilité d'un vaccin avant la fin de l'année 2020 (lire).
L'enjeu est important. Car un vaccin permettrait de libérer l'économie des restrictions sanitaires en cours, ouvrir les frontières et reprendre une dynamique de production plus vigoureuse. Certains secteurs vont immédiatement réagir en Bourse, surtout ceux où les valorisations sont extrêmement basses.
Ces secteurs sont essentiellement cycliques. On pense au tourisme et au BTP essentiellement.
Dans le secteur touristique, représenté en Bourse par Risma, on peut imaginer la formation d'un plancher psychologique majeur puisque "le pire sera considéré comme derrière". L'action a perdu la moitié de sa valeur cette année alors que l'entreprise amorçait enfin l'assainissement de sa situation financière en se débarrassant d'une partie de sa dette colossale. La crise sanitaire a peut-être remis les compteurs à zéro et il faudra tout reconstruire. Mais l'effet psychologique de la réouverture des frontières risque de soutenir le cours. Rappelons juste que cette action avait trouvé une valeur d'équilibre autour de 170 DH entre 2018 et 2019 et qu'elle traite en ce moment autour de 90 DH.
Le BTP est, lui, bien mieux positionné pour profiter de la reprise. Les cimentiers, Jet Contractors, Sonasid....des entreprises qui profitent de la commande publique et qui sont pour le moment pénalisées par des baisses des rythmes de production sur les chantiers. Avec un vaccin, on peut imaginer une reprise de la production et avec elle une meilleure visibilité pour ces entreprises, d'autant plus que la commande publique sera l'un des catalyseurs majeurs du plan de relance.
Snep semble être un cas particulier. La société a su adapter son offre pour profiter de la crise sanitaire en mettant le paquet sur l'eau de javel. Le retour à la normale, couplé aux besoins grandissants en produits d'entretien, devrait lui offrir un profil de croissance encore plus solide que celui affiché sur la première moitié de l'année. En baisse de 15% depuis le début de l'année, le cours de Bourse ne semble intégrer ni les résultats du S1 ni les perspectives.
Reste à savoir si la rotation sectorielle continuera à profiter aux dossiers qui ont progressé durant la crise sanitaire ou assisterons- nous à des prises de bénéfices sur la thématique «confinement». On pense ici à des dossiers comme Label'Vie, HPS et Microdata.
Les minières pourront, elles, continuer à profiter de cours hauts des métaux précieux tant la pandémie est loin d'être éradiquée dans le monde et les politique monétaires toujours aussi accommodantes. D'autant plus que la hausse des cours des métaux précieux au deuxième trimestre ne devrait se reflèter sur les comptes des entreprises qu'au troisième trimestre .
Les secteurs les plus décotés, comme l'immobilier, les sociétés de crédits et la distribution automobile risquent eux de continuer de pâtir encore d'un moral des ménages au plus bas et d'une faible capacité à investir dans un contexte qui sera marqué par une hausse attendue du chômage.
Paradoxalement, l'actualité des marchés à l'international est toute autre. Sur les marchés européens et américains, les investisseurs sont de nouveau à l'achat sur les dossiers confinement, télécoms et nouvelles technologies en tête, au moment où les restrictions imposées se multiplient et les menaces de confinement reviennent. Il faut dire que ces pays tournent le dos aux vaccins chinois et font de ce sujet une question de souveraineté. Au brésil, le débat sur l'utilisation d'un vaccin chinois est devenu un enjeu électoral. Le pays a même annulé une commande avant de revenir dessus lundi.
La situation sanitaire principal catalyseur des marchés
Malgré les incertitudes et la recrudescence des cas, le marché actions évolue bien au-dessus de son plus bas annuel, porté par des taux bas et la perspective de voir la banque centrale faire un nouveau geste d'assouplissement en décembre ou en mars. Dans ce contexte, toute amélioration du climat sanitaire viendrait en soutien à la tendance en cours. «La fin du confinement et de l’état d'urgence sanitaire devraient entraîner un rebond progressif et mécanique de l’activité et de la demande. Dans ce sillage, la masse bénéficiaire devrait graduellement renouer avec le chemin de la normalisation sur les deux prochaines années (2021E et 2022E) et revenir vers un niveau proche de celui observé en 2019», écrivait lundi CFG Research dans une note de recherche (Lire). Le redressement de la masse bénéficiaire sera tributaire de facteurs essentiellement liés aux conséquences de la crise sanitaire comme le ralentissement/éradication de l'épidémie, l'absence d’un nouveau confinement, la reprise des chantiers dans le BTP et l'immobilier, le redressement du secteur touristique suite à la réouverture des frontières, ou encore la reprise des projets d'investissements et d'infrastructures. Les analystes évoquent également des catalyseurs plus techniques comme la non-récurrence des contributions au fonds dédié à la gestion de la crise liée à la Covid-19, la reprise de la demande nationale grâce aux divers plans de relance et aux mesures de soutien aux secteurs les plus touchés par la crise sanitaire et la reprise de la demande étrangère adressée au Maroc.
A.H