Alors que la très attendue loi sur la Bourse a été votée puis publiée au Bulletin officiel en mars dernier, les opérateurs se demandent quel sort sera reservé aux fonds indiciels. Au-delà de la bureaucratie habituelle qui ralentit la mise en place de ce type d'innovation, ces fonds posent un problème philosophique qu'il faudra résoudre.
Les fonds indiciels ou ETF sont des OPCVM classiques à quelques détails près : Ils sont cotés en Bourse. Ces fonds offrent plusieurs avantages aux investisseurs, car en y investissant, ils s'autorisent une diversification de portefeuille difficile à appliquer sur de petites bourses. Cela ouvre aux investisseurs particuliers les portes de la gestion indicielle liquide, puisque les positions peuvent être ouvertes ou fermées à tout moment, à la différence du système de souscriptions/rachats des OPCVM traditionnels. Cette diversification offerte par les ETF a permis une semi-professionnalisation des investisseurs privés dans des pays plus développés. De plus, les possibilités d'innovation pour les sociétés de gestion sont importantes : Elles peuvent lancer des fonds sectoriels, des fonds à indice de volatilité ou encore des fonds passifs qui ne font que refléter la performance globale du marché. Pour l'investisseur, cette diversification réduit énormément le risque, car il est toujours plus simple de parier sur une tendance globale du marché ou d'un secteur que sur une action individuelle susceptible de dévisser à tout moment à cause d'une mauvaise information. Techniquement, la nouvelle loi sur la Bourse, qui élargit les prérogatives de la société gestionnaire, permet désormais de créer un marché dédié aux ETF par les équipes de Karim Hajji. Mais la balle n'est pas dans le camp de la Bourse, mais plutôt chez les autorités de tutelle. En effet, selon nos informations, la loi sur les OPCVM doit être revue pour permettre la création de ces fonds, s'ensuivra alors une série de circulaires de l'AMMC pour réguler cette activité.
ETF et liquidité : Une question philosophique
Ces produits n’ont jamais vraiment décollé dans des pays comme le Botswana ou le Ghana, qui ont pourtant lancé ces produits pour justement apporter de la liquidité à leur Bourse. On peut même dire que seuls l'Afrique du Sud et le Nigéria arrivent à tenir un marché d'ETF correct.
Ce dossier a trop traîné dans les tiroirs du ministère, en cause, un problème philosophique laisse les autorités perplexes. Car "la logique" voudrait que ces produits apportent de la liquidité sur le marché boursier grâce aux intérêts spéculatifs. Or, les autorités marocaines estiment que le marché doit d'abord être liquide pour bien assurer une rampe de lancement à ces produits. En effet, dans les couloirs, on nous a expliqué que la position des régulateurs est justifiée par les expériences d'autres pays africains. Car, pour l'instant, hormis l’Afrique du Sud, seules 6 Bourses africaines proposent des ETF. Cependant, le nombre d’ETF et la diversité de ces derniers demeurent pauvres avec seulement 3 produits en moyenne par place boursière. De plus, une étude commandée par la Bourse de Casablanca montre que ces ETF sont pour la plupart indexés sur des matières premières (or et platine), chose qui n'est pas envisageable pour l'heure au Maroc. Ces produits n’ont jamais vraiment décollé dans des pays comme le Botswana ou le Ghana, qui ont pourtant lancé ces produits pour justement apporter de la liquidité à leur Bourse. On peut même dire que seuls l'Afrique du Sud et le Nigéria arrivent à tenir un marché d'ETF correct.
Un risque concurrentiel pour les fonds classiques
Toujours selon l'étude commandée par la Bourse de Casablanca sur ces fonds, aux Etats-Unis, plus important marché d’ETF mondial, les actifs sous gestion de cette catégorie de fonds progressent au détriment des fonds classiques, une tendance qui s'observe également en Europe et en Asie et qui incite à y réfléchir à deux fois avant de cannibaliser cette jeune industrie. Pour toutes ces raisons, il est peut-être prématuré d'attendre l'arrivée de ces fonds, à moins que, dans le cadre de l'accélération de la mise en place de l’accompagnement de Casa Finance City, les autorités ressortent ce dossier. Mais quoiqu'il en soit, il existe, avec la nouvelle loi sur la Bourse, des projets prioritaires comme la mise en place d'un marché alternatif dédié aux PME et la cotation des entreprises étrangères désormais légalement possible.