Bank Al-Maghrib confirme les bonnes perspectives économiques pour le Maroc en 2015 : 5% de croissance, un déficit du compte courant à 3%, un déficit budgétaire à 4,3%. En revanche, malgré les efforts de la Banque centrale, le crédit bancaire ne parvient pas à décoller.
Malgré un environnement international des plus incertains, le Maroc est parti pour connaître une année 2015 des plus réjouissantes sur le plan économique. Tout d’abord, les bonnes perspectives pour la croissance du PIB se confirment : elle se situerait pour 2015, selon la Banque centrale, autour de 5%, tirée par une hausse de près de 15% de la valeur ajoutée agricole, grâce à une «exceptionnelle campagne agricole de 110 millions de quintaux». Le rythme de croissance desactivités non agricoles devrait, lui, s’accélérer légèrement à 3,5%. La balance des paiements est également en nette amélioration, souligne Abdellatif Jouahri, Wali de Bank Al-Maghrib, lors de son traditionnel point de presse trimestriel. Le recul des importations lié à la baisse de la facture énergétique (-33% à fin mai) et le dynamisme des exportations tirées par l’industrie automobile et, surtout, les phosphates, ont permis à la balance commerciale de s’alléger de près de 25%. Ajoutons à cela la hausse des transferts des MRE de 5,5%, les dons des pays du Golfe de l’ordre de 13 milliards de dirhams, la hausse de 22% des flux nets au titre des IDE, un baril qui ne devrait pas flamber (autour de 63 dollars), et on se retrouve avec un déficit du compte courant qui devrait avoisiner les 3% en 2015, et des réserves de change qui atteignent à fin mai 2015 194 milliards de DH, soit 5 mois et 25 jours d’importations de biens et services. La Banque centrale prévoit un niveau de 6 mois d’importations à fin 2015. L’optimisme est similaire pour ce qui concerne les comptes publics. Les dépenses globales ont enregistré un recul de 7% grâce à une charge de compensation qui fond comme neige au soleil (-59,6%). Sur les quatre premiers mois de l’année, le déficit budgétaire s’est contracté de 49,6%. «L’objectif d’un déficit budgétaire à 4,3% sera vraisemblablement atteint», indique A. Jouahri. Il souligne enfin que l’inflation reprend et qu’elle reste en ligne avec les objectifs de stabilité des prix : elle devrait s’établir à 1,5% pour l’année 2015. Quant au taux directeur, il reste inchangé à 2,5%.
Crédit bancaire : «les ressources sont là !»
Justement, le taux directeur est l’autre motif de satisfaction de Jouahri puisque les deux baisses successives opérées l’an dernier ont finalement eu les résultats escomptés sur le plan des taux débiteurs. Ces derniers ont enfin baissé de 22 points de base, lors du premier trimestre 2015, à la plus grande satisfaction de la Banque centrale. «La transmission, qui était notre point faible, commence enfin à donner ses fruits», se félicite Jouahri.
Il consent toutefois un problème au niveau du crédit bancaire qui ne décolle toujours pas. A fin mai, le crédit n’a augmenté que de 2,5%. Pour 2015, il devrait croître de 4%. Insuffisant pour soutenir l’économie. Pourtant, à en croire le Wali de BAM qui se réfère aux résultats de l’enquête sur les conditions d’octroi du crédit, ce ne serait pas un problème d’offre, mais plutôt un problème de demande de la part des entreprises. «Les dépôts bancaires augmentent beaucoup plus vite que les crédits (+6%) et en particulier les dépôts à terme qui sont en hausse de façon très consistante. Les ressources sont là ! Mais les opérateurs préfèrent vraisemblablement placer leur argent plutôt que de se lancer dans des opérations d’investissement», fait remarquer le Wali. En tout cas, la Banque centrale ne ménagera pas ses efforts pour faciliter l’accès de la TPME au crédit bancaire. «Dans le cadre du Fonds de soutien à la PME, plus d’une centaine de dossiers ont été examinés, et nous avons débloqué 700 millions de DH. Et les choses vont s’accélérer», indique Jouahri.
La banque centrale compte même aller plus loin dans sa volonté de libérer le crédit bancaire pour les PME, comme l’explique Jouahri : «dans le cadre des injections de liquidité hebdomadaires pour alimenter le marché interbancaire, nous allons mettre en place des critères de répartition qui prennent en compte à la fois l’effort de crédit fait par la banque, le total des crédits dans ses emplois et la transmission des baisses des taux directeurs aux taux débiteurs». En d’autres termes, il s’agit d’une petite prime pour les banques qui vont desserer le robinet du crédit. «Nous essayons de trouver le biais par lequel on peut forcer un petit peu les banques à prendre plus de risques, et susciter la demande», conclut Jouahri.
Amine Elkadiri - Finances News Hebdo