Il a fallu attendre 5 jours après la divulgation de l’affaire des Panama Papers, dans laquelle le secrétaire particulier du Roi, Mounir El Majidi, est cité, pour enfin avoir les réactions de toutes les parties prenantes... Ou presque.
Pour rappel, Panama Papers, c’est 11,5 millions de documents concernant 214.000 sociétés offshore. Ces documents révèlent que deux biens ont été achetés via des sociétés offshore dont Majidi était l’administrateur. Quelques jours après ces révélations, dans une interview accordée à Medias24, l’avocat de Mounir Majidi, Me Hicham Naciri, justifie l’utilisation de sociétés offshore par le secrétaire particulier du Roi par un souci d'optimisation fiscale : «Rien n’interdit de chercher la structure de détention la plus optimale», estime l’avocat, tout en défendant la légalité des opérations. Selon lui, "la localisation géographique d’un bien, un souci d’optimisation fiscale ou même une volonté de discrétion», peuvent expliquer ces méthodes. "Discrétion mais pas camouflage", martèle-il.
Des questions d'ordre moral
Jusqu'à présent, personne n'a pu démontrer l'illégalité de ces opérations. Mais, selon un responsable à la DGI, "ce type d'optimisation est impossible pour vous et moi. De plus, l'optimisation fiscale consiste à profiter intelligemment des lacunes des lois. Dans le cas présent, il faudra mener les investigations nécessaires pour voir la légalité ou non de ces opérations".
Réactions mitigées dans la classe politique
Face à la déferlante sur les réseaux sociaux, difficile pour les politiques de garder le silence. Hier, lors du point de presse habituel tenu après le Conseil du gouvernement , le ministre de la Communication et Porte-parole du gouvernement, Mustapha El Khalfi, a été interrogé sur l’ouverture éventuelle d’une enquête concernant le volet marocain de l’affaire. «Je ne dispose d’aucune information concernant l’ouverture d’une enquête par le gouvernement à ce sujet», déclare-t-il. Telquel a par ailleurs recueilli les déclarations de plusieurs hommes politiques. «Je ne suis pas au courant de cette histoire, je ne peux pas me prononcer là-dessus», estime Rachid Rokbane, président du groupe PPS au Parlement. Hakim Benchamass, président de la deuxième Chambre du Parlement, a préféré renvoyer la balle dans le camp d’Ilyas El Omary, actuellement en déplacement. Pour autant, d’autres réactions, comme celle de Omar Balefrej, membre de la Fédération de la gauche démocratique, sont plus marquées : «je suis vraiment étonné de voir que des biens aient été achetés à partir d’un paradis fiscal qu’est le Panama. Je trouve que c’est mauvais pour la réputation du pays», rapporte Telquel.
Le PJD et l'Istiqlal, pour leur part, promettent de sortir avec des positions officielles.
Entre populisme, lynchage et réalité
Le citoyen lambda, qui trime pour gagner quelques sous à la fin du mois, est le plus honnête des contribuables. Mais il est également le plus oppressé fiscalement. C'est un fait et ce n'est pas cette histoire et ses éventuelles conséquences qui vont y changer quelque chose. Sur Internet, certains crient au complot contre le Maroc, quand d'autres exigent que cette affaire soit tirée au clair.
Quant à la réalité économique, elle est tout autre. Plusieurs entreprises au Maroc, de tailles et métiers différents détiennent des sociétés offshore leur permettant d'optimiser leur fiscalité, et ce dans la légalité la plus absolue.
En cela, il faut savoir que 6 banques de la place détiennent des filiales offshore qui pèsent 41 Mds de dirhams d'actifs à fin décembre 2015, avec plus de 2 Mds de dirhams de dépôts clientèle dans le but de réaliser des opérations hors territoire pour leurs clients. Leur activité est florissante et est supervisée, contrôlée et réglementée par Bank Al-Maghrib. Tout ça pour dire que l'activité offshore est un outil fiscal et financier, qu'elle n'est pas forcément illégale.
Mais la loi, elle, doit être appliquée de la même manière pour tous. Et surtout pour ceux qui donnent des leçons de moral et se trouvent souvent aux premières loges pour prôner l'éthique. Ces hommes censés incarner une certaine morale au regard de leur statut au sein de la collectivité.