LONDRES (Reuters) - L’Iran va commencer à utiliser l’euro à la place du dollar pour ses échanges commerciaux dans le cadre des efforts du pays pour réduire sa dépendance vis-à-vis de la devise américaine en raison des tensions politiques avec Washington, a rapporté mercredi l’agence officielle de presse Isna.
La décision, prise en conseil des ministres, pourrait aussi encourager les organismes et les entreprises publiques à accroître leur utilisation de la monnaie unique européenne au détriment du billet vert.
Le gouverneur de la banque centrale, Valiollah Seif, a déclaré la semaine dernière que le guide suprême, l’ayatollah Ali Khamenei, avait salué sa proposition de remplacer le dollar par l’euro dans le commerce extérieur, “le dollar n’ayant plus sa place dans nos transactions aujourd’hui”.
Téhéran essaye depuis des années de marginaliser la devise américaine mais l’essentiel des échanges internationaux du pays s’effectue toujours en dollar et la plupart des Iraniens l’utilisent aussi pour voyager ou tout simplement pour leur épargne.
Le président américain Donald Trump a renouvelé, le 12 janvier, la suspension des sanctions économiques dont bénéficie l’Iran aux termes de l’accord sur le nucléaire de 2015.
Mais il a fixé le même jour un ultime délai de 120 jours, soit jusqu’au 12 mai, pour permettre aux Etats-Unis et à leurs partenaires européens de corriger les “terribles défauts” dont souffre, selon lui, l’accord signé le 14 juillet 2015 par l’Iran et les puissances du P5+1 (les cinq membres permanents du Conseil de sécurité - Chine, France, Royaume-Uni, Etats-Unis et Russie - plus l’Allemagne).
Les transactions bancaires en dollars sont déjà difficiles en Iran en raison de risques juridiques, les entreprises étrangères pouvant être exposées à des sanctions si elles réalisent des opérations avec l’Iran en dollars, même si celles-ci se font via des succursales non-américaines.
La France commencera à proposer des crédits libellés en euros aux acheteurs iraniens de ses biens d’ici la fin de l’année pour éviter d’éventuelles sanctions américaines, avait déclaré le directeur de Bpifrance en février.
La menace de sanctions américaines a affecté le marché iranien des changes ces derniers mois.
La monnaie nationale, le rial, a perdu la moitié de sa valeur sur le marché libre entre septembre et la semaine dernière, à un creux d’environ 60.000 contre le dollar avant que les autorités ne fixent un taux de change de 42.000 et ne lancent une mise en garde contre l’utilisation d’autres taux de change au risque d’encourir une amende.
L’ayatollah Ali Khamenei a attribué mercredi les “récents problèmes sur le marché des devises” aux ennemis étrangers de la République islamique et demandé aux services de renseignement iraniens de désamorcer les complots contre le pays.
Le porte-parole de la police Saïd Montazer al Mahdi, cité par l’agence Isna, a affirmé que 39 personnes échangeant des devises avaient été arrêtées “pour avoir perturbé le marché” et que 80 boutiques de change non agrées avaient été fermées ces derniers jours.