Dans ce qui suit, Dr Abdlekrim Meziane Bellafquih, Chef de Division des maladies transmissibles à la direction d’epidémiologie et de lutte contre les maladies relevant du ministère de la Santé, répond aux questions de l' agence MAP :
1- Premièrement, la décision de déconfiner va être prise sur quelle base ?
La gestion d'une crise telle que celle du Covid-19 tient compte bien sure de l’évolution des indicateurs épidémiologiques mais aussi d’autres facteurs notamment sociaux et économiques. Ces trois pôles, sanitaire, économique et social peuvent paraître à juste titre antagonistes. Ce qui fait que la gestion de cette situation consiste à faire des va et vient entre ces trois pôles.
L’intelligence est de trouver un équilibre ou un deal entre l’exigence de sécurité sanitaire d’un côté, un rythme ou un rendement économique et une harmonie sociale de l’autre côté. Cet équilibre nous permettra de reprendre progressivement un fonctionnement socio-économique normal sans omettre notre sécurité sanitaire.
2- Plusieurs pays ont annoncé ou entamé la levée progressive du confinement. Comment se fera le retour à la vie "normale" ?
Le ministère de la Santé ne gère pas directement cette question de phasage du déconfinement. D’autres intervenants sont plus concernés. Ce qu’on peut dire c’est que le passage de la phase confinement à la phase du déconfinement ne se fait pas du jour au lendemain. Il y a des phases intermédiaires à respecter pour ne pas brusquer ou hypothéquer l’équilibre dont on a parlé plus haut.
D'une autre manière, le déconfinement doit se faire progressivement tout en gardant un œil sur l’évolution de la situation épidémique dans notre pays et aussi dans le monde.
3- Quelles mesures doivent être prises par les Marocains pour réussir la première étape ?
La situation actuelle est maitrisée. On peut dire que l’épidémie est globalement sous contrôle.
Ceci a été possible grâce à un certain nombre de mesures anticipatives opérées par l’ensemble des citoyens. Donc, il faut que chaque citoyen participe et veille, durant les étapes à venir, à préserver les acquis de cette situation.
4- Les virus, notamment le Covid-19 existera pour toujours, que faire pour bien se protéger et se préparer, tant qu'un vaccin efficace n'a pas été trouvé ?
L’évolution de l’épidémie du Covid-19 dépendra du niveau de l’immunité au sein de chaque population et communauté.
Pour que l’épidémie Covid-19 cesse de se propager dans une communauté, il faut que cette dernière soit immunisée contre le virus en question.
L’immunité s’acquiert de deux manière : le contact avec le virus dans le cadre d’une contamination ou bien un contact volontaire lors d’une vaccination.
Pour le vaccin, il n’est pas disponible pour le moment et les prévisions le promettent pour fin 2020 ou début 2021.
Pour l’immunité post-exposition, à l’heure actuelle beaucoup de questions persistent, notamment sur la durée. On parle d’une durée d’immunité de 6 mois mais c’est encore tôt pour se prononcer sur ce point.
Un deuxième point important c’est le niveau de l’immunité dans la communauté après le passage de l’épidémie Covid-19. Il dépend directement des mesures déjà prises pour ralentir et contrôler la propagation du virus.
Ce niveau d’immunité de la population serait de l’ordre de 15 à 20 % alors que pour atteindre une bonne immunité communautaire contre le virus du Covid-19 il faut que le taux soit de l’ordre de 70 à 75 %.
Donc en résumé, l’immunité de la population aussi bien mondiale que nationale n’est pas encore acquise. Le virus sera encore là. Il faut maintenir les moyens et mesures de protection déjà en vigueur à savoir l’hygiène, la distanciation, le port du masque.
5- Et si il y a une deuxième vague de cette pandémie, est ce qu'un re-confinement sera programmé dans ce cas ?
Cela dépendra de plusieurs éléments notamment du type et de variante du virus (le même ou muté), du niveau de l’immunité de la population, de la date de la survenue par rapport à la première et de l’existence ou non de vaccin.