LONDRES (Reuters) - Le Royaume-Uni doit présenter d’urgence un nouveau plan pour éviter une sortie sans accord de l’Union européenne dans dix semaines et un choc sur les marchés, ont déclaré des dirigeants du secteur financier après le rejet au Parlement du projet d’accord négocié par la Première ministre, Theresa May.
Les parlementaires ont rejeté le texte par 432 voix contre 202, une majorité bien plus large qu’anticipé.
“Le temps presse pour éviter un ‘no deal’ chaotique qui serait une catastrophe pour l’économie britannique”, a déclaré Stephen Jones, directeur général d’UK Finance, association qui regroupe les banques britanniques.
L’accord de divorce négocié par Londres et Bruxelles prévoyait une période de transition jusqu’en décembre 2020 qui, a redit mardi l’Association des marchés financiers en Europe (AFME), est indispensable pour assurer une sortie ordonnée de l’UE.
“C’est très bien d’avoir une majorité parlementaire contre un Brexit sans accord mais il faut une période de transition sous une forme ou une autre”, a déclaré Catherine McGuinness, patronne du quartier financier de la City.
Les régulateurs britanniques et ceux de l’UE ont mis en place des plans d’urgence en cas de Brexit sans accord mais les firmes les plus petites ne seraient pas prêtes à temps, fait-elle valoir.
Les incertitudes persistantes après le vote de mardi ne peuvent que conforter les banques, les compagnies d’assurance et les sociétés de gestion de la City dans la recherche de points de chute dans l’Union européenne après la sortie du Royaume-Uni.
“Le résultat de ce soir ne modifie pas les perspectives pour la City”, a réagi mardi Omar Ali, qui suit le secteur financier britannique au cabinet de conseil EY.
“ON A PASSÉ LE POINT DE NON-RETOUR”
Selon EY, les sociétés financières basées en Grande-Bretagne ont déjà annoncé des plans pour transférer 800 milliards de livres (903 milliards d’euros) d’actifs hors du pays en raison du Brexit.
“On a passé le point de non-retour”, a commenté un banquier.
Howard Davies, le président de Royal Bank of Scotland (RBS), est à Francfort cette semaine pour des discussions avec la BaFin, le régulateur allemand des marchés financiers, en vue de l’obtention d’une licence bancaire dans l’UE.
Felix Hufeld, le président de la BaFin, a indiqué mardi que plus de 45 institutions financières prévoyaient de s’établir ou de renforcer leur présence en Allemagne en conséquence du Brexit. Ce chiffre marque une nette hausse par rapport aux “plus de 25” dossiers en cours dont il avait fait état en août.
Parmi les banques qui ont annoncé des transferts d’activité à Francfort figurent Citigroup, JPMorgan Chase, Morgan Stanley et Standard Chartered.
Si la City est unie pour réclamer une période de transition, il n’y a pas de consensus pour la suite.
Certains banquiers espèrent une solution à la norvégienne, qui permettrait à Londres de conserver un accès au marché unique à condition de continuer de contribuer au budget de l’UE et de respecter ses règles.
Mark Carney, le gouverneur de la Banque d’Angleterre, a affirmé le mois dernier qu’un centre financier de la taille de Londres ne saurait être gouverné par l’Europe.
“Si l’on se réfère à la Norvège et si on considère cela comme une solution de long terme, je serais très préoccupée par l’aspect décisionnel”, a renchéri Catherine McGuinness mardi.