Le Deutschland AG est un réseau complexe de participations croisées entre grandes entreprises industrielles ou financières en Allemagne. Informel, ce réseau a été pendant les années 90 mis en veille car il n'était plus utile à l'économie allemande. Il permettait, depuis la fin de la deuxième guerre mondiale, de protéger les entreprises vulnérables face aux attaques du marché, aux risques de faillite ou aux tentatives hostiles de rachat. Une sorte d'entraide informelle entre géants. Deutsche Bank était au coeur de ce réseau. Elle a notamment possédé 28% du constructeur automobile Daimler-Benz, 25% du distributeur Karstadt, 100% du sidérurgiste Klöckner et 23% du producteur de sucre Südzucker, pedant qu'ils étaient en crise. Deutsche Bank s'est ensuite éloignée au cours des années 2000 de ce rôle de soutien à l'industrie allemande au profit d'activités plus spéculatives pour certains, alors que d'autres estiment que cet éloignement est mutuel et semble être causé par une période de longue croissance en Allemagne, qui sortait d'une crise de chômage durant les années 80.
Le réveil de Deutschland AG
Selon l'agence Reuters, de grandes entreprises allemandes ont discuté entre elles, dans le cadre de cette alliance informelle, de la possibilité de prendre une participation symbolique dans Deutsche Bank pour l'aider à surmonter ses difficultés actuelles. Reuters dit rapporter les propos d'un dirigeant de l'une de ces sociétés.
Réseau Deutschland AG. Source : mpfifg.de. En jaune, les relations entre entreprises financières. En orange, entre entreprise financières et industrielles. En rouge, entre entreprises industrielles.
Ces discussions impliquent une poignée d'entreprises de premier plan et portent sur la conclusion d'une alliance de circonstance pour acheter une participation relativement faible dans Deutsche Bank, mais suffisante pour aider la banque à convaincre d'autres investisseurs, a dit ce dirigeant d'une "des principales entreprises cotées sur l'indice Dax à la Bourse de Francfort" annonce l'agence. "Il y a eu des échanges et des discussions à ce sujet", a dit ce patron. Le journal Handelsblatt rapporte pour sa part la même information et évoque même l'injection de 5 milliards d'euros dans le capital de la banque. Deutsche Bank a refusé de s'exprimer sur ce point.
Une telle initiative représenterait une inversion des rôles par rapport à l'époque du miracle économique allemand, de l'après-guerre jusqu'aux années 1990, quand Deutsche Bank possédait des pans de l'industrie allemande et venait en aide aux entreprises en difficulté. La reine de "Deutschland AG" serait donc sauvée par ses petits ? Pour beaucoup d'observateurs allemands, ce ne serait que renvoyer l'ascenseur.