Alors que la Bourse de Casablanca connaît une fin de semestre agitée, l’IPO de Vicenne, programmée pour la mi-juillet, tombe à point nommé pour redynamiser le marché. La société évolue dans un secteur de la santé qui bénéficie d'un bon momentum grâce aux grands chantiers de l’État : Généralisation de l’AMO, investissements publics en hausse et expansion rapide des acteurs privés en sont les principaux drivers.
Créée en 2004 sous le nom de Best Health, Vicenne a longtemps opéré dans l’ombre de la haute technologie médicale. Deux décennies plus tard, le groupe s’impose comme un intégrateur complet, structuré autour de cinq piliers : équipements, consommables implantables, maintenance, traitement des déchets médicaux et développement international. Le modèle repose sur une combinaison à haute intensité technologique : des équipements critiques (radiothérapie, imagerie, bloc opératoire), un socle de consommables à usage régulier, et une infrastructure de services biomédicaux certifiés, allant de la formation à la maintenance.
«Nous ne sommes pas un simple distributeur. Nous intégrons des solutions de bout en bout, de la conception à la maintenance, et formons les médecins sur les technologies que nous déployons», souligne Adnane Zerhouni, directeur général de Vicenne.
Vicenne s’adresse à la fois au public et au privé, avec un portefeuille client équilibré et une forte implantation dans les infrastructures hospitalières. Présente également au Sénégal et en Côte d’Ivoire, l’entreprise ne se contente plus de suivre la demande locale mais commence aussi à anticiper l’expansion régionale.
«L’Afrique francophone est un levier de croissance que nous préparons dès maintenant. Le Maroc reste notre base, mais l’export sera décisif à moyen terme», ajoute-t-il.
Une IPO pour activer un levier d’un milliard de dirhams
L’opération porte sur une augmentation de capital de 500 millions de dirhams, sans cession d’actions existantes. À 236 dirhams l’action, Vicenne propose 2,1 millions de titres, visant un flottant de 20%. L'objectif ? Activer un levier d’investissement d’environ un milliard de dirhams, entre equity et dette, pour financer son plan de croissance. Le pipeline identifié comprend 700 millions de dirhams de projets de croissance externe (avec 2 ou 3 acquisitions prévues à horizon 2030), et la société affiche une feuille de route précise : extension logistique, densification des services récurrents (maintenance, traitement des déchets, consommables) et consolidation en Afrique francophone.
«Cette opération n’est pas une sortie d’actionnaires. C’est un levier de transformation pour renforcer nos positions et aller chercher de nouvelles verticales médicales à forte valeur ajoutée», précise Adil Bennani, président du conseil d’administration.
Entre 2022 et 2024, le chiffre d’affaires de Vicenne est passé de 582 à 837 millions de dirhams, soit un TCAM proche de 20 %. L’EBE a bondi de 107 à 174 millions, avec une marge opérationnelle de 20,8 % en 2024. Le résultat net atteint 91 millions cette même année. Sur ces bases, le business plan anticipe 1,33 milliard de chiffre d’affaires en 2027 et 1,81 milliard en 2030, avec une rentabilité opérationnelle stabilisée autour de 22–24 %. Le groupe annonce une croissance moyenne annuelle de 11,7% sur la période 2025–2030, bien en deçà de sa trajectoire récente, ce qui confère à ses hypothèses un vernis de prudence assumée. «Ce business plan est pré-money. Il ne reflète pas encore la pleine capacité d’investissement que cette IPO va nous permettre d’activer», a insisté Zerhouni lors de la conférence.
Côté valorisation, la société est proposée à un multiple VE/EBITDA 2025 de 8,7x et un PER de 4,6x. Des niveaux nettement en dessous des standards de marché. Une décote d’environ 30% par rapport à la valeur intrinsèque estimée par DCF renforce l’attractivité du dossier pour les investisseurs en quête de croissance sous-valorisée.
La structuration de l’offre, pilotée par CFG Bank et Valoris, suit les standards désormais éprouvés : deux tranches selon le ticket d’investissement (≥3 MDH et ≤50 kDH), un noyau d’actionnaires stable (GAZ) engagé sur 40 % du capital post-IPO pour trois ans, et un dispositif de gouvernance aligné sur les meilleures pratiques.
«Cette IPO nous engage à une discipline renforcée. Elle est aussi un signal clair adressé à nos clients et partenaires sur notre volonté d’être un acteur pérenne, transparent, et structuré», insiste Bennani.