TOKYO (Reuters) - La période légale de 22 jours de détention de Carlos Ghosn prendra fin lundi au Japon, où l’ancien président de Nissan, accusé de fraude financière, n’a toujours pas été inculpé depuis son arrestation le 19 novembre.
inculpé lundi mais qu’il ne serait probablement pas libéré, car à nouveau arrêté.
Voici ce qui peut se produire:
COMMENT GHOSN PEUT-IL ÊTRE DE NOUVEAU MIS EN ARRESTATION?
Procéder à plusieurs arrestations successives d’une même personne dans un dossier donné, pour des motifs chaque fois légèrement différents, est une pratique relativement courante au Japon. Elle permet aux procureurs de maintenir les suspects en détention tandis qu’ils poursuivent leurs investigations et de continuer à les interroger sans la présence d’un avocat.
D’après le journal Nikkei, le parquet de Tokyo a l’intention d’arrêter à nouveau Carlos Ghosn lundi en l’accusant d’avoir sous-estimé ses revenus pour trois années supplémentaires.
Les médias japonais rapportent que le PDG de Renault et de l’alliance Renault-Nissan dément les accusations portées à son encontre. Ses avocats ne se sont pas exprimés publiquement.
GHOSN PEUT-IL ÊTRE LIBÉRÉ SOUS CAUTION?
Si Carlos Ghosn est de nouveau arrêté, cela ouvrirait une nouvelle période de détention d’une durée maximale de 22 jours. Ensuite, s’il n’est pas encore une fois mis en arrestation, la justice pourrait évoquer un risque de fuite pour lui refuser une libération sous caution, disent des experts juridiques.
Les procureurs sont généralement réticents à accorder une libération sous caution aux suspects qui clament leur innocence, dit Nobuo Gohara, lui-même ancien procureur au sein de l’unité spéciale du parquet de Tokyo conduisant l’enquête sur Carlos Ghosn.
Ces pratiques amènent ses détracteurs à parler d’un “système judiciaire fondé sur la prise en otage”, dans lequel les accusés sont maintenus en détention jusqu’à des aveux, ajoute Nobuo Gohara.
COMMENT SONT TRAITÉS LES SUSPECTS AU JAPON?
Avant d’être inculpées ou relâchées, les personnes arrêtées au Japon sont généralement privées de tout contact avec l’extérieur et placées dans de petites cellules sans grande intimité.
Les avocats peuvent rendre visite à leurs clients mais ne peuvent pas être présents durant les interrogatoires, qui peuvent durer huit heures par jour.
“Les suspects deviennent nerveux et se perdent dans leurs déclarations”, affirme Masashi Akita, un avocat d’Osaka. “Ce qui est particulièrement dur d’après les suspects, c’est que les procureurs n’écoutent pas, peu importe le nombre de fois où vous répétez la même chose.”
La fédération japonaise des barreaux, les Nations unies et des organisations de défense des droits de l’homme dénoncent ces pratiques. Les détracteurs du système judiciaire japonais s’interrogent aussi sur un taux de condamnation de 99,9% au Japon.
“Chaque pays a sa propre culture et son propre système”, a déclaré la semaine dernière Shin Kukimoto, procureur adjoint, lors d’une conférence de presse. “Je ne suis pas certain qu’il soit juste de critiquer les autres systèmes simplement parce qu’ils sont différents.”
A partir de 2019, les interrogatoires menés dans le cadre de dossiers ouverts par l’unité d’enquête spéciale , celle qui est chargée de Carlos Ghosn, devront être enregistrés. Le parquet affirme que les interrogatoires de l’ex-président de Nissan sont enregistrés.
LE “LANCEUR D’ALERTE” PEUT-IL CONCLURE UN ACCORD AVEC LA JUSTICE?
Le directeur général de Nissan, Hiroto Saikawa, a dit que les pratiques reprochées à Carlos Ghosn avaient été mises au jour par un lanceur d’alerte, dont l’identité n’a pas été révélée. On ignore cependant si ce dernier a eu simplement connaissance de ces pratiques ou y a participé.
Dans ce deuxième cas, les procureurs pourraient lui demander de témoigner contre Carlos Ghosn en échange de leur clémence. La possibilité de conclure de tels accords n’a été introduite dans le droit japonais qu’en juin dernier et n’a été utilisée qu’à une seule reprise jusqu’à présent.