PLANO (Texas)/SAN FRANCISCO (Reuters) - Les risques qui se multiplient pour l’économie américaine, y compris le “shutdown” imposé par l’administration Trump, ont manifestement provoqué un consensus au sein de la Réserve fédérale pour ralentir le rythme des hausses de taux, y compris parmi les tenants d’une ligne dure.
Lors de prises de parole séparées mardi, des responsables de la Fed aux opinions habituellement divergentes ont été unanimes à souhaiter une pause dans les hausses de taux tant que perdureront des risques comme le ralentissement de la croissance chinoise mais aussi l’impasse budgétaire à Washington.
La fermeture partielle des administrations fédérales prive 800.000 employés de salaire depuis près d’un mois et fragilise aussi de nombreux sous-traitants. Des économistes estiment qu’il réduit la croissance américaine de 0,1 point de pourcentage ou plus chaque semaine.
Quel que soit l’impact précis, “nous savons qu’il est négatif à un moment où même sans cela se présentaient un certain nombre d’incertitudes”, a déclaré Robert Kaplan, le président de la Fed de Dallas, lors d’un discours mardi devant la Chambre de commerce de Plano, dans le Texas.
En conséquence, il estime que la Fed devrait attendre au moins “un trimestre ou deux” avant de relever à nouveau ses taux d’intérêt.
La volatilité des marchés financiers et du crédit rend également prudents les banquiers centraux américains, qui se demandent si les hausses de taux graduelles des dernières années commencent seulement maintenant à freiner les dépenses des ménages et les investissements des entreprises.
“Il faudra un peu de temps pour permettre à cette situation de se décanter (...) Je pense que c’est une question de mois, pas de semaines”, a dit Robert Kaplan.
Esther George, figure de proue des “faucons” à la Fed, a conforté l’impression d’un consensus en prônant à son tour la patience. Depuis des années, la présidente de la Fed de Kansas City réclamait imperturbablement des taux plus élevés pour éviter une montée de l’inflation et la formation de bulles.
“Pour l’heure, il me semble qu’on doit procéder avec prudence et nous montrer patients”, a-t-elle dit dans un discours au siège de son établissement. “Une pause dans le processus de normalisation nous laisserait le temps de voir si l’économie répond comme attendu au ralentissement de la croissance à un rythme soutenable sur la durée.”
Neel Kashkari, son collègue de Minneapolis qui critique depuis le début le resserrement des taux au motif que l’inflation ne décolle pas, a lui bu du petit lait. “Il est inutile d’éteindre l’économie avant qu’elle ne se mette à chauffer vraiment”, a-t-il fait valoir devant la Chambre de Commerce de Rochester (Minnesota).
La Fed a relevé ses taux à quatre reprises en 2018, après trois relèvements l’année précédente, pour les porter à 2,5%.
Le président de la Fed Jerome Powell a donné le signal d’une attitude plus pragmatique le 4 janvier, des propos réitérés six jours plus tard et depuis repris par ses collègues gouverneurs et présidents d’antennes régionales.