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         Sothema est un opérateur global du secteur pharmaceutique. Il y a 3 ans, en pleine pandémie, ce groupe s’est retrouvé propulsé au-devant de la scène dans le projet royal consistant à sécuriser l’approvisionnement du Maroc en vaccins et impliquant Sothema dans les tests cliniques préalables aux vaccins anti-Covid de Sinopharm.

Et si Lamia Tazi et ses équipes se sont vu confier les manettes de ce projet, c’est parce que le groupe dispose de bien des atouts industriels, notamment dans les médicaments injectables, et d’un CV robuste.

L’une de ses forces, c'est le positionnement bien défendu sur le marché des médicaments pour pathologies lourdes avec une offre des plus compétitives sur les anticancéreux.

Sothema est également présente dans les traitements antidiabétiques avec ses insulines et dans les traitements antithrombotiques comme l’enoxaparine.

La société, valorisée actuellement en Bourse à près de 10 milliards de dirhams, exporte en Afrique 15% de sa production et est appréciée par les analystes financiers qui couvrent le secteur, pour étant «l’unique producteur de médicaments issus de biotechnologie au Maroc et en Afrique, premier spécialiste dans la fabrication des médicaments injectables à l’échelle de l’Afrique.

Nous avons rencontré le management pour faire le point sur l’activité et les perspectives prometteuses de ce fleuron industriel marocain.

Boursenews : La période Covid-19 était intense pour Sothema. Comment vous êtes-vous adaptés ? Avez-vous stoppé la production ?

Lamia Tazi : Ce qu’il faut retenir de la période de la pandémie de Covid-19 qui a été de tous les challenges pour Sothema, c’est que nous avions réussi à faire un pas en avant considérable en gestion de crise. Il faut se rappeler qu’en tant qu’établissement d’importance vitale pour le Maroc, les laboratoires pharmaceutiques - en l’occurrence Sothema - ont été confrontés à un double défi : préserver les vies en évitant les contaminations dans le milieu de travail et maintenir voire augmenter la production et les livraisons des médicaments. Il fallait donc s’adapter au confinement et au travail à distance.

Avant l’annonce du premier confinement en mars 2020, nous avions activé un Plan de continuité d’activité (PCA), qui a identifié plusieurs risques opérationnels et qui s’est soldé par plus de 200 plans d’actions implémentés. Résultat : Sothema a maintenu ses livraisons de médicaments car elle n’a souffert d’aucune rupture en matière d’intrants ni d’arrêt de production. L’énoxaparine est l’un des traitements qui a été le plus utilisé durant la crise sanitaire à l’échelle mondiale vu qu’il prévenait les caillots sanguins causés par le Covid 19. La pression sur les fabricants de cette substance a été forte. Plusieurs ruptures aussi bien de la matière première que du produit fini ont été enregistrées durant la pandémie car la demande sur l’énoxaparine s’est tout simplement multipliée par 10.

Boursenews : Des ruptures ont-elles été observées au Maroc ?

Lamia Tazi : Le Maroc n’a souffert d’aucune rupture. La mobilisation de toute l’industrie et surtout la chance du Maroc de posséder une fabrication locale de qualité et de grande capacité nous ont épargnées des situations de ruptures difficiles.

Boursenews : Parlez-nous des projets sur lesquels Sothema s’est lancée en réponse à la pandémie de Covid-19 ?

Lamia Tazi : Il faut rappeler que grâce à la vision de Sa Majesté le Roi, le Maroc a inauguré de nouvelles activités prometteuses, notamment la fabrication des dispositifs de diagnostic, les études cliniques et les vaccins. Dans chacun de ces domaines, Sothema a eu la grande chance de soutenir le plan national de riposte contre le Covid-19. Et ce, en mettant à la disposition de l’Etat marocain son unité de production aseptique pour fabriquer des millions de doses de vaccins, en étant pionnière dans la fabrication de millions de tests covid et en étant le premier laboratoire à réaliser une étude clinique vaccinale à l’échelle de l’Afrique. Evidemment, il s’agit de domaines qui contribuent fortement à la sécurité sanitaire et à la souveraineté nationale pharmaceutique. 

«Sothema a été le premier laboratoire à réaliser une étude clinique vaccinale à l’échelle de l’Afrique»

 

Boursenews : Venons-en au présent. Que faut-il retenir de vos résultats financiers 2022 ?

Mohamed Tazi : L’exercice 2022 a été marqué par une conjoncture difficile due essentiellement à l’inflation des intrants. Malgré cela, Sothema a fait preuve d’une résilience exemplaire et a terminé l’année avec des réalisations satisfaisantes. Dans un contexte de crises sanitaire, géopolitique et économique, et d’une stagnation de l’activité pharmaceutique mondiale avec une croissance estimée à fin 2022 entre 2 et 3%, Sothema a réalisé un chiffre d’affaires en progression de 9,3% par rapport à l’exercice 2021, s’établissant à 2,3 milliards de DH contre 2,05 milliards de DH l’année précédente. Elle a conservé son classement en tant que leader du secteur pharmaceutique marocain avec une part de marché d’environ 10%. En termes de résultats, Sothema a réalisé une croissance de 4% sur son résultat d’exploitation qui est passé de 430 millions de DH en 2021 à 448 millions de DH cette année. Ceci démontre la capacité de Sothema à maîtriser l’impact de l’inflation sur son exploitation, en faisant preuve d’une excellence opérationnelle et d’une utilisation optimale de ses facteurs de production. Quant au résultat net, il s’est élevé à 282 millions de DH en 2022 contre 281 millions de DH en 2021, soit une variation de + 0,05%. Cette profitabilité reste largement satisfaisante. Réaliser un ratio de marge bénéficiaire nette de presque 13% dans un contexte de crise est une réussite. Cela dit, notre profitabilité aurait pu être encore plus satisfaisante si nous n’avions pas à subir le renchérissement des facteurs de production, des cours de change en hausse à l’international ainsi qu’une cotisation de solidarité sociale en hausse de 9 millions de DH par rapport au montant payé l’exercice précédent.

 «Sothema a conservé son classement en tant que leader du secteur pharmaceutique marocain avec une part de marché d’environ 10%.»

 

Boursenews : Un mot sur vos perspectives ?

Mohamed Tazi : En termes de perspectives, les activités de Sothema continueront à croître de façon satisfaisante grâce à plusieurs leviers essentiels. D’abord, l’élargissement de la couverture médicale qui couvrira 22 millions de nouveaux assurés, ce qui dopera la consommation des médicaments à l’échelle nationale. Ensuite, les politiques du Maroc visant à promouvoir l’industrie locale et le made in Morocco se traduiront par une préférence nationale à la fabrication locale des médicaments. Il y a aussi l’expansion internationale de Sothema à travers de nouvelles représentations en Afrique et dans les pays arabes. Ceci induira une hausse des exportations de médicaments comme les biosimilaires, les héparines, l’insuline ainsi qu’une variété de génériques.

Boursenews : En plus de l’export, allez-vous développer de nouveaux produits ?

Mohamed Tazi : Effectivement. L’un des leviers de croissance essentiel pour Sothema reste l’enrichissement permanent d’un pipeline diversifié de produits à forte valeur, couvrant des aires thérapeutiques comme l’oncologie, la psychologie, la cardiologie, la diabétologie et l’infectiologie avec un accent mis sur l’amélioration du Time to Market. Nous projetons de lancer, durant la période entre 2023 et 2026, une cinquantaine de nouvelles molécules. Enfin, il y a les perspectives prometteuses représentées par Prodimedic et Ziwig dans le secteur encore vierge des dispositifs médicaux et de diagnostic. 

«Nous projetons de lancer, durant la période entre 2023 et 2026, une cinquantaine de nouvelles molécules»

Boursenews : Sothema a réalisé plusieurs opérations de croissance externe ces dernières années. D’autres sont à venir ? 

Mohamed Tazi : Tirant les enseignements de la crise du Covid-19, notre plan de développement s’est naturellement orienté vers des investissements innovants et de l’avenir, comme les dispositifs médicaux et les tests de diagnostic basés sur les technologies ARN et la médecine de précision. C’est pourquoi, nous avions annoncé deux opérations majeures, à savoir le rachat de 40% de Prodimedic avec la perspective d’implanter une unité locale de production des dispositifs médicaux et une participation dans le capital de Ziwig, une start-up européenne de premier plan, qui révolutionne le diagnostic médical en le rendant plus précis grâce à des technologies de pointe. Evidemment, notre plan de développement vise aussi, entre autres, le renforcement de notre croissance organique et l’expansion de notre footprint en Afrique et au Moyen-Orient. A ce propos, nous sommes en pourparlers avec des partenaires de l’Afrique de l’Est en vue de réaliser des opérations d’acquisition de parts dans des sociétés pharmaceutiques locales, voire d’implanter des filiales spécialisées dans les secteurs pharmaceutiques où nous sommes leader, comme l’injectable. J’ajoute aussi que Sothema s’est beaucoup activée en 2022 en vue d’avancer dans ses projets d’expansion. Nous nous sommes fait accompagner par un cabinet international ayant une expertise en stratégies de développement dans les pays émergents. En vertu des conclusions du business model proposé, nous avions démarré une campagne de prospection, et nous avions participé à de nombreux roadshows avec divers partenaires potentiels.

Propos recueillis par Adil Hlimi